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LES SERVICES SPÉCIAUX MAROCAINS PISTAIENT DES MINISTRES ALGÉRIENS DE PASSAGE À PARIS

La guerre secrète du roi

A Alger, c'est la consternation et les observateurs sont unanimes: cette affaire risque de donner un sérieux coup d'arrêt à la collaboration sécuritaire entre les services de renseignements algériens et français.

Telle une bombe à retardement, une affaire d'une extrême sensibilité risque de perturber sérieusement le ciel serein des relations algéro-françaises. Trois ministres algériens, dont deux étaient en fonction au moment des faits, ont été espionnés par les services de renseignements marocains avec la complicité d'un capitaine de la police aux frontières françaises (PAF). Et quels ministres? Hamid Grine qui a dirigé le département de la communication de mai 2014 à juin 2017, Tahar Hadjar ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique toujours en poste et Noureddine Yazid Zerhouni ex-ministre de l'Intérieur et ancien patron des services de renseignements. L'affaire dévoilée par deux journaux français, Libération et Le Point n'en est qu'à ses débuts et promet d'autres révélations encore plus fracassantes sur le grenouillage des services marocains en France. Selon les mêmes journaux, les enquêteurs ont démantelé un trafic inédit de «fiches S» à destination du Maroc. Un policier, proche de la retraite, a transmis, des informations classées «confidentiel défense» aux agents du Royaume chérifien. Dans le cadre de ses fonctions, le mis en cause, est censé rédiger des rapports destinés à sa hiérarchie, lorsque des personnes fichées «S» étaient signalées à l'entrée du territoire français. Or, ce capitaine de la PAF faisait passer ces mêmes rapports au responsable de l'Icts, une société privée, implantée à Orly et spécialisée dans la sécurité aérienne et aéroportuaire. Ce dernier, à son tour, transmettait les documents aux agents marocains. Selon l'enquête, le capitaine de la PAF a effectué plusieurs voyages au Maroc, tous frais payés, et qui pourraient être la contrepartie des informations livrées. Du capitaine Nemo qu'admire tant le président Emmanuel Macron pour avoir nommé ainsi son chien, la France passe au capitaine ripoux.
D'autre part, les noms de plusieurs agents des services marocains ont pu être identifiés lors des écoutes téléphoniques diligentées par la juge d'instruction.
C'est connu de par le monde, l'aéroport a toujours été un lieu de prédilection des services de renseignements. Passage obligé pour les personnalités influentes, les hommes politiques, les opposants et tout autre profil qui peut intéresser les services de renseignements.
Ce n'est pas la première fois que les services spéciaux marocains se distinguent par des affaires pour le moins douteuses, en terre française. Ils font de l'Hexagone un lieu fabuleux pour le lobbying, nouer des contacts et au besoin s'adonner à des actes de torture, des enlèvements et au besoin des assassinats. Il y a tout juste trois ans, en février 2014, c'est le patron de la direction générale de la surveillance du territoire (Dgst) marocaine, qui a été visé par une plainte pour complicité de torture. La gifle aux services marocains a été tellement forte qu'elle a retenti sur la planète entière. Il s'en est suivi une brouille qui ne prendra fin qu'un an plus tard, après intervention de l'Elysée. Le tableau de chasse de la Dgst marocaine est encore plus fourni par l'affaire Ben Barka qui n'a pas encore connu son épilogue. Très proche de l'Algérie où il a suivi des études en mathématiques de 1940 à 1942, Mehdi Ben Barka a été un farouche opposant au roi Hassan II. Le 29 octobre 1965, alors que Ben Barka se rend à un rendez-vous à la brasserie Lipp à Paris, il est enlevé et son corps ne sera jamais retrouvé. Après cinquante et une années d'une enquête judiciaire qui n'est toujours pas terminée. L'implication des services de renseignements marocains n'a jamais été contredite. Irrité par cette affaire qui a entaché les relations franco-marocaines, le général de Gaulle a traité à cette époque, le roi Hassan II de «trou du c...».
Quant aux notes de l'ambassade d'Algérie retrouvées dans le domicile de l'espion marocain Driss A. (directeur de la société de sûreté ICTS à Orly), elles relatent leurs déplacements à Paris, il n'est pas exclu qu'elles soient également fuitées au niveau du Quai d'Orsay où devait nicher une, voire plusieurs taupes marocaines. A Alger, c'est la consternation et les observateurs sont unanimes: cette affaire risque de donner un sérieux coup d'arrêt à la collaboration sécuritaire entre les services de renseignements français et algériens. Une affaire qui va ébranler la confiance pourtant bien établie entre les deux pays. A quoi bon en effet, de livrer des informations sensibles si au final elles atterrissent entre les mains des services marocains?
Le premier risque est d'aboutir à la rétention de l'information ce qui sera un sérieux préjudice à la sécurité internationale. Avec le retour des éléments de Daesh de Syrie, d'Irak et de Libye, qui dans leur majorité sont français et belges, il y a de quoi craindre de nouveaux Bataclans. Et ce n'est pas Rabat qui va sauver Paris. A part le tadjin et les billets offerts gracieusement aux convives ciblés, les services de renseignements marocains sont la lanterne rouge dans le monde. Aussi bien dans les pays nordiques, à Bruxelles, à Paris ou dernièrement à Barcelone, ils n'ont ni averti ni déjoué les attaques commises dans ces pays par des Marocains en majorité.
Ce qui est encore inacceptable aux Algériens c'est qu'ils sont signalés aux Marocains dès leur arrivée sur le territoire français. Ainsi, ils sont pistés et encourent de graves risques. Il n'est pas exclu que les effets personnels des ministres risquent d'être volés, leurs chambres d'hôtel fouillées et leurs téléphones subtilisés par une agression. Nos ministres, nos officiels ne sont plus en sécurité maintenant que certains membres des services spéciaux français sont de connivence avec leurs homologues marocains. La France est-elle incapable d'assurer la sécurité des officiels étrangers? L'Hexagone est-il devenu à ce point une passoire? Ou alors les autorités françaises ont-elles fermé l'oeil sur ce dossier explosif? Car ce que viennent de révéler les quotidiens Libération et le Point n'est que la face visible de l'iceberg.

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