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Il reconnaît les crimes coloniaux et refuse le pardon

Les rétropédalages de Macron

Concernant la repentance, les chefs d'Etat français ne s'y sont risqués qu'avec une prudence plus que millimétrée.

Au sommet Afrique-France à Montpellier, une rencontre sans chefs d'Etat, consacrée à un débat entre le président français et des jeunes Africains venus de tout le continent, un blogueur sénégalais a sommé la France de «demander pardon au continent africain», pour les crimes de la colonisation. Emmanuel Macron, qui a reconnu «la responsabilité immense de la France dans le commerce triangulaire et la colonisation», s'est refusé à demander pardon, privilégiant «un travail de vérité» et non de «honte de soi et de repentance».
Le président-candidat, qui multiplie les «show préélectoraux», a bien appris sa leçon et semble la répéter sans erreur: «La France ne s'excuse pas, mais reconnaît ses crimes». Quelle grandeur y a-t-il dans la reconnaissance des crimes, s'il n' y a pas de repentance et excuses? Comment peut-il défendre la «voie de la vérité», en appelant à son ensevelissement? Le 20 septembre dernier, à l'occasion de la réception organisée à l'élysée à la mémoire des harkis, Macron a bien demandé pardon «aux combattants abandonnés, à leurs familles qui ont subi les camps, la prison, le déni». Il a demandé pardon aux harkis abandonnés, mais pas aux Algériens torturés par Aussaresses, ni à ceux massacrés par le général Salan ni aux gazés du maréchal Bugeaud, encore moins aux brûlés au Napalm, ainsi que les victimes des essais nucléaires de Reggane. Mais là, c'est sa manière à lui de reconnaître (enfin!) que les harkis sont français et de dire que la France ne demande pardon qu'à ses enfants.
Au Rwanda, Macron ne s'est pas excusé aussi du rôle de la France, lors du génocide des Tutsi, qui avait fait près d'un million de morts en 3 mois. Au mémorial du génocide de Kigali, l'hôte de l'élysée a usé de quelques ellipses et arrangements avec le passé, pour réussir son examen de passage dans un pays où la mémoire de la présence française reste vive. Il a résumé le drame par l'ignorance de la France d'avoir été «aux côtés d'un régime génocidaire», avant de reconnaître «l'ampleur de nos responsabilités» et d'appeler «ceux qui ont traversé la nuit de nous faire le don de nous pardonner».
Là où les États-Unis, la Belgique et l'ONU avaient exprimé leurs excuses depuis la fin des années 1990, Macron a choisi, lui, d'user d'une gymnastique linguistique terrible pour éviter le pardon, en demandant aux victimes de le lui accorder. L'équilibrisme choisi par Emmanuel Macron ne dupe personne. Le président qui a trouvé des motifs dédouanant la France de ses responsabilités, semble oublier que le pardon se demande clairement, avant d'espérer qu'il soit octroyé.
Mais peut-on être surpris des déclarations du président français, lorsqu'on sait que ce dernier, obnubilé par le rendez-vous d'avril, s'est lui-même dédit? Il avait bien reconnu en 2017 que la colonisation française en Algérie était «un crime contre l'Humanité», avant de virer à 180°, en tentant de balayer d'un revers de la main les 132 ans de crimes, enfumades et massacres commis par la France coloniale.
Il est vrai que concernant la repentance, les chefs d'Etat français ne s'y sont risqués qu'avec une prudence plus que millimétrée. Mais ces derniers, il faut le leur reconnaître, sont restés constants. En 2003, Jacques Chirac avait appelé à «regarder le passé en face, d'un côté comme de l'autre». Nicolas Sarkozy, lui, a condamné le système colonial, «injuste par nature», tout comme François Hollande qui a reconnu «les souffrances que la colonisation a infligées au peuple algérien». Emmanuel Macron, lui, a été le président qui s'était rapproché le plus de la vérité, en parlant de crime contre l'Humanité avant de sombrer, il y a quelques jours, dans le délire des Zemmour et Le Pen, en s'attaquant à l'Algérie et son Histoire.
Mais si les présidents français ne demandent pas pardon, les chefs d'Etat d'autres pays l'ont fait comme l'Allemagne, la Turquie ou encore le Canada.
Ce n'est pas pour autant que ces pays auront «honte d'eux-mêmes», comme le prétend le président français. Bien au contraire, c'est tout à l'honneur de ces nations.

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