La filière du cuir sera-t-elle relancée?

Encore un gisement de devises. Celui dont il est question vaut son poids de peaux de moutons. 20 millions de dollars paraît-il. Une manne financière qui peut tomber annuellement dans les caisses du Trésor. L'Algérie, qui a traversé une féroce crise financière suite à la dégringolade des prix du pétrole, qui n'est d'ailleurs pas encore totalement surmontée, ne doit pas laisser passer une telle aubaine.
Le succès qu'a connu la collecte des peaux de moutons durant la fête de l'Aïd el-Adha est un premier pas. Près de 900.000 peaux d'ovins sacrifiés à cette occasion ont été récupérées au niveau des six wilayas pilotes sélectionnées pour cette opération, à savoir Alger, Oran, Sétif, Constantine, Jijel et Batna. Une réussite exceptionnelle. L'objectif des 800.000 fixé par le ministère de l'Industrie et des Mines qui est à l'origine de cette opération a été largement atteint. Avec à la clé 500 tonnes de laine.
Cette initiative première du genre, a pour but essentiel à «les mettre à la disposition des tanneries pour leur valorisation et utilisation dans l'industrie du cuir, une filière à fort potentiel à l'export», avait souligné le département de Youcef Yousfi. Cette matière première providentielle peut être à l'origine de relance de la filière du cuir. Constituer le fer de lance de toute une industrie qui en plus d'être créatrice de richesses sera tout aussi créatrice d'emplois.
Particulièrement dans les zones rurales dont l'élevage constitue l'une des principales activités économiques. Régions productrices de viandes et par conséquent de son sous-produit: le cuir, elles détiennent un potentiel énorme pour donner naissance à une industrie du cuir performante. Une activité qui nécessite une forte demande en main-d'oeuvre. Ce qui peut contribuer à réduire le chômage dans ces zones souvent déshéritées. Ce qui ne sera pas négligeable pour un pays dont le taux de chômage tourne autour des 11%. A condition bien entendu que cette opération ne tourne pas en eau de boudin, ne soit pas que de la poudre aux yeux.
Les potentialités ne manquent pas, la ressource aussi et la qualité du cheptel national est attestée. Reste à savoir s'il se fera une place au soleil dans un marché réputé pour sa rudesse concurrentielle.
Le commerce mondial du cuir, qui compte parmi les marchandises le plus souvent échangées, s'élève à plus de 50 milliards de dollars par année et va en croissant, selon les données de la revue trimestrielle du Centre de commerce international. L'Algérie ratera-t-elle une telle opportunité? Dotée d'atouts naturels, reconnus, elle ne doit pas rater pareille occasion de se placer sur les marchés mondiaux. Des marchés loin d'être saturés même si les pays en développement détiennent déjà 45% du commerce mondial des articles en cuir.
L'Algérie qui a opté pour un nouveau modèle de croissance économique pour moins dépendre de ses exportations d'hydrocarbures ne peut se permettre de rajouter cette corde à son arc. La filière du cuir, un secteur moribond qui a déjà bénéficié par le passé d'une enveloppe financière conséquente, 5 milliards de dinars en 2011, pour sortir la tête de l'eau. 15 entreprises spécialisées dans la fabrication de la chaussure ont été dissoutes, 30 autres qui activaient dans le domaine des textiles et de la confection ont disparu. Ce qui a engendré la destruction de 30.000 emplois ces dernières années. Un phénomène qui a touché en priorité les régions de l'intérieur du pays et provoqué un départ massif vers les grandes villes pour y trouver un emploi. Avec cette opération de collecte de peaux de moutons, de nouvelles perspectives se dessinent. Le marché international de la filière du cuir est prometteur. Une occasion à ne pas rater. Le mouton algérien y vendra, certainement chèrement sa peau...