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Kurdes et EI, l'insoutenable position d'Ankara

Il se passe des choses bizarres, voire singulières, au fin fond des frontières entre la Turquie, la Syrie et l'Irak. En effet, voilà un pays qui combat les Kurdes chez lui, les aide en Syrie et traite en égal avec eux en Irak. Ce qui, d'ailleurs, souleva l'ire de Baghdad qui accusa Ankara de traiter avec la région autonome kurde comme si elle était un Etat indépendant. De fait, la position de la Turquie sur la question kurde est à tout le moins ambivalente: dès lors qu'il s'agit de «ses» Kurdes ou de ceux des pays voisins. Quoique à un degré moindre, le même phénomène est observé également en Iran qui entretient d'excellents rapports avec les Kurdes irakiens - Téhéran a fait parvenir aux «peshmergas» (milices ou soldats kurdes?) des armes et des conseillers militaires pour lutter contre Daesh - tout en réprimant ses propres Kurdes. Notons que les Kurdes eux-mêmes - même s'ils s'entraident dans la tragédie qu'ils vivent actuellement - ne semblent pas prêts à unifier leurs efforts pour donner à leur cause la dimension qu'elle mérite. Reste l'ambiguïté de la position de la Turquie face à la question kurde et à la lutte contre l'Etat islamique (EI, Daesh). Ankara qui a inscrit le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) sur la liste noire des organisations terroristes, ne semble éprouver aucun embarras à «travailler» avec les frères syriens et irakiens des Kurdes turcs. Du reste, les Kurdes turcs font l'objet d'un certain ostracisme de la part de ladite «communauté internationale». Celle-ci tout en mettant le PKK sur la liste des organisations terroristes, créa au début des années 1990, une «zone d'exclusion» pour les Kurdes irakiens, laquelle zone se transforma en «région autonome». Notons que le Kurdistan irakien, mettant à profit la guerre contre l'Etat islamique, a élargi son «territoire» au-delà des limites qui lui étaient reconnues en s'emparant de la riche région pétrolière contestée de Kirkouk. Ce qui ajoute à la complexité de la question kurde aggravée par l'irruption calamiteuse de l'Etat islamique. Or, la Turquie n'est pas totalement innocente dans l'avènement dudit «Etat islamique» (ancien Al Qaîda en Irak) qui a ouvert grandes ses frontières aux jihadistes venus de divers horizons - selon les médias ils sont au moins de 80 nationalités - pour faire un sort au régime syrien et à son président Bachar al-Assad. Accusation reprise, la semaine dernière, par le vice-président américain, Joe Biden - dans un discours prononcé à l'université de Harvard - qui affirma: «Nos alliés dans la région ont été notre plus grand problème en Syrie.» Que M.Biden se soit excusé par la suite auprès de Ankara ne change rien au fait - qui n'était du reste un secret pour personne - que la Turquie a beaucoup à se reprocher dans l'expansion du groupe jihadiste armé qui a pris de larges portions des territoires irakien et syrien. Lauréat du prix Pulitzer, le journaliste, Seymour Hersh, révélait en avril dernier qu'un accord classifié existe entre la CIA, la Turquie et les rebelles syriens pour créer ce que l'on appelle une «ligne de rat». La «ligne de rat» était un réseau clandestin utilisé pour acheminer des armes et des munitions en provenance de Libye, via la Turquie, à travers la frontière syrienne. Le financement a été fourni par la Turquie, l'Arabie Saoudite et le Qatar. Ankara qui essaya de jouer sur tous les fronts s'est ainsi mise dans une situation impossible, en fait insoutenable, tant du point de vue de son aide, directe ou indirecte aux rebelles et aux jihadistes syriens, que par son deux poids, deux mesures, face au peuple kurde, aidant les uns, coopérant avec les autres et traitant ses Kurdes de pestiférés. Même l'aide apportée aux Kurdes syriens s'avère sournoise dès lors qu'une fois la frontière franchie, Ankara a interdit à ces derniers de retourner en Syrie pour défendre leur ville principale, Kobané qui lutte contre les jihadistes de l'EI. Les dirigeants turcs arguent du fait qu'il y a risque que des rebelles du PKK, s'infiltrent parmi les Kurdes syriens. Un dilemme! Or, tout en refusant d'intervenir militairement contre l'EI en Syrie - de peur, dit-elle, de conforter le régime de Bachar al-Assad - Ankara presse dans le même temps la coalition internationale à intervenir au sol en Syrie se réservant le droit de faire intervenir son armée de terre. Décidément, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, fait une fixation sur son homologue syrien. Cela étant, en Turquie, la répression des Kurdes turcs se poursuit comme en témoignent les manifestations de Diyarbakir et des villes du Kurdistan turc - en soutien aux Kurdes syriens de Kobané - réprimées dans le sang mercredi et jeudi derniers. Dans le contexte du Moyen-Orient, la position de la Turquie est au plan diplomatique, tactique et humain indéfendable.

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