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TAXI, LIVRE DE KHALED AL KHAMISSI

Un portrait acide de l'Egypte d'aujourd'hui

Le dernier Salon international du livre d'Alger (Sila) a été une occasion inespérée pour acheter des livres dont on a tant entendu parler et qu'on n'a, jusque-là, jamais trouvés dans les librairies.

Taxi, de l'écrivain-journaliste égyptien Khaled El Khamissi, en fait partie. Ce livre traduit dans plusieurs dizaines de langues, notamment en Europe, est un best-seller. Il a bénéficié d'une grande médiatisation et de louanges méritées un peu partout. Mais, souvent, pour ne pas dire trop souvent, les livres dont on parle trop laissent le lecteur sur sa faim. Certains laissent même à désirer mais ils sont exposés aux feux de la rampe pour des raisons qui échappent à toute raison littéraire ou talent.
C'est loin d'être le cas de Taxi de Mohamed Al Khamissi. Au début, en ouvrant ce livre, le lecteur peut penser qu'il s'agit d'un énième roman qui raconte l'Égypte ou encore d'un récit inspiré de faits réels. Ni l'un ni l'autre ne sont pourtant le genre de ce livre passionnant, qui se lit d'un trait. Il ne s'agit pas non plus d'un roman épistolaire comme Les liaisons dangereuses ou La Nouvelle Héloise de Jean-Jacques Rousseau.
Khaled El Khamissi a choisi une manière toute particulière mais guère ennuyeuse de dire l'Egypte, son Egypte, qui ressemble tant à notre Algérie et à tant d'autres pays où les situations cocasses foisonnent sans qu'aucun n'ose en revanche les dépeindre et les pointer du doigt. Les situations kafkainnes en question, on les retouve un peu partout dans le mode de vie quotidien et échappe souvent à la logique et à la raison.
C'est de ce terreau-là que Khaled El Khammissi a puisé toute son inspiration pour écrire un livre succulent dont on ne se lasse aucunement en dépit d'un style d'écriture tout à fait ordinaire et où les envolées lyriques et les métaphores sont aux abonnés absents. Mais chaque écrivain a sa propre technique pour retenir l'attention du lecteur.
Dans le livre de Khaled El Khamissi, il y a d'abord ce choix de faire dérouler toutes les scènes à l'intérieur de taxis où l'auteur ou le narrateur prend place. Et tout se passe entre les deux personnages. Au total, cinquante-huit chapitres, concis mais consistants où le lecteur aura le loisir de voir ce que tout le monde regarde sans en sentir le côté kafkaïen. L'auteur décortique avec un humour caustique plusieurs angles de la vie quotidienne de son pays durant le début des années 2000.
Lors des échanges savoureux entre les deux personnages, il y est question de situations réelles vécues au quotidien comme les phénomènes de la bureaucratie, la pauvreté et son corollaire la misère, les actes de violence gratuits, etc.. La plume mordante de Khaled El Khamissi usant d'un vocabulaire et d'une simplicité déconcertante rappelle d'autres auteurs du même pays à l'instar de Alaa El Aswany et son inénarrable Immeuble Yakoubien mais aussi l'avocat des pauvres et des paresseux Albert Cossery, un grand romancier francophone d'Egypte, qui a quitté son pays natal pour vivre dans une chambre d'hôtel à Paris jusqu'à sa mort.
A l'instar de l'auteur de Mendiants et orgueilleux, Khaled Al Khamissi se limite à narrer et à décrire cette mal-vie sans porter de jugement au sujet des situations mises sous sa loupe d'écrivain. Il a réussi un autre pari, grâce à son talent: en cinquante-huit tableaux de vie quotidienne, l'auteur ne tombe pas dans la redondance. C'est ce qui fait que le lecteur est entraîné dans ce voyage par taxi qui n'en finit pas et où l'on ne repasse pas par le même endroit. L'auteur, véritable navigateur, sait mener à bond bord son compagnon: le lecteur. Et une fois, la dernière page lue, la première envie qui se manifeste chez le lecteur c'est de lancer à l'endroit de l'auteur ou plutôt du conducteur du taxi: «Encore un tour, s'il vous plait!».
C'est dire que le désir de relire ce livre est difficile à réprimer. Khaled Al Khamissi a réussi à écrire un livre exceptionnel et agréable à lire sans pour autant en revêtir une importante dimension littéraire car, comme souligné plus haut, la fluidité du texte ne laisse pas de place aux exercices de style qui font d'un récit une oeuvre littéraire. Mais Taxi reste tout de même un livre profond en dépit du style littéraire qui lui fait défaut. C'est à ce niveau que se situe tout le génie de Khaled Al Khamissi. Le livre, traduit en langue française, est édité chez Acte Sud, en France.

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