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Tolérances

« La tolérance ? Il y a des maisons pour ça ! » Paul Claudel

Peut-être qu'un jour, des paléontologues éclairés nous diront comment les groupes humains qui ont un jour quitté la Corne de l'Afrique pour coloniser le monde ont pu former cette vaste mosaïque de peuples si différents, dans leur physionomie, leur organisation politique, leurs croyances, leurs us et coutumes, leurs langues, leurs codes de communication, leur habitat, leur alimentation, leur agriculture, leur industrie...
Et pourtant, c'est la même espèce animale. Evidemment, cette tour de Babel qui n'a pas fini de se diviser ni de s'uniformiser, présente toujours cette riche mosaïque colorée, faite de groupements humains qui se ressemblent autant qu'ils se différencient, malgré les progrès gigantesques des moyens de communication et l'agression des civilisations dominantes par médias interposés.
Si dans certains cas, l'adoption de nouvelles moeurs se fait en douceur, petit à petit, sans heurts particuliers, les plus faibles adoptent les comportements de ceux qui sont plus développés technologiquement; dans certains cas, le choc des civilisations produit des conflits qui sont habilement exploités par les hommes politiques qui bâtissent leur succès sur ce sentiment qui s'appelle l'intolérance.
Les philosophes du siècle des Lumières avaient bien mis en évidence cette dichotomie du genre humain et avaient, soit sérieusement présenté les différences de coutumes comme naturelles ou avec humour comme dans la question: «Comment peut-on être persan?» Ces philosophes insistaient sur le fait que ce qui paraissait bien ici, peut paraître mal là-bas. Au moment de la grande mondialisation, une femme politique du parti de M.Sarkozy, s'indignait sur la Toile d'une attitude qui l'avait choquée sur une des plages de l'Hexagone: elle était indignée qu'un homme, accompagné d'une femme vêtue d'un hidjab prenne son bain alors que sa compagne, restée sur le sable, toujours habillée de pied en cap, se contentait de suivre les ébats aquatiques de son mâle. Aussitôt sortirent les vieux clichés, les poncifs de la femme musulmane soumise et restée en marge du progrès et des libertés fleurirent l'indignation de la partisane de Sarkozy. A aucun moment, personne n'est allée demander à la dame au hidjab les raisons du supplice qu'elle vivait: rester au bord de l'eau sans pouvoir se rafraîchir. Peut-être qu'elle n'avait pas envie de nager, de tremper même son petit bout de pied dissimulé à la concupiscence environnante? Peut-être que la faculté lui a déconseillé les bains saumâtres... Notre professeur d'histoire de l'art, le regretté Andrzei Kamynski, qui avait une culture encyclopédique, nous avait raconté cette savoureuse anecdote survenue en 1960. La Pologne socialiste de Gomulka avait invité à se produire à Varsovie, le corps de ballet folklorique de la République de Guinée. Or, ce ballet devait produire une danse entièrement exécutée par des femmes en topless. Les dirigeants de la culture en Pologne firent remarquer au directeur du ballet que la population polonaise recevrait mal ce manquement à la pudeur qui régnait dans un pays où l'Eglise catholique a toujours une influence moyenâgeuse.
Le responsable du ballet guinéen eut un sourire déconcertant. Il comprenait bien le problème et il proposa aux censeurs polonais qu'il respecterait les moeurs polonaises à condition que le ballet polonais respectât en retour, les moeurs guinéennes en se produisant dans le plus simple appareil à Conakry, conformément aux coutumes locales. Toujours à propos de moeurs, deux villes situées de part et d'autre de la frontière germano-polonaise, sur la façade baltique, avaient connu des frictions sérieuses en 2008: les Polonais (toujours eux) ne supportaient pas que leurs voisins géographiques, leurs alliés dans l'Otan et leurs associés dans l'UE, des Allemands qui ont connu la Réforme, cultivant autant le corps que l'esprit, se baladent sur la plage en costume d'Eve et d'Adam. Imaginons tout de suite que de pareilles frictions se produisent sous nos latitudes où la tolérance demeure un concept de science-fiction: cela donnerait lieu à des incidents auprès desquels les affrontements du M'zab passeraient pour des actes d'amour. La tolérance étant une garantie de la réussite d'une politique touristique, les marchands du Temple sauront bien trouver une solution à ce petit différend.

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