Quand la pression de la rue fait la loi

Au mois d'octobre dernier et au lendemain de la signature du contrat entre le président du MCA, Achour Betrouni avait annoncé que «nous nous sommes entendus avec Ighil pour jouer la carte du titre, j'estime que nous avons l'effectif exigé pour réussir un tel pari». A ce moment là, le MCA partageait avec l'USM El Harrach la quatrième place au classement avec 11 points chacun. Moins de quatre mois plus tard, la direction du MC Alger a décidé de mettre fin aux fonctions de l'entraîneur Meziane Ighil au lendemain du nul concédé sur sa pelouse face à l'USM Blida (0-0) pour le compte de la 19e journée du championnat de Ligue 1 Mobilis. Aujourd'hui, le MC Alger occupe la cinquième place avec 28 points, à 13 longueurs du leader l'USM Alger. Au premier constat, on s'aperçoit que logiquement ce n'est pas du tout catastrophique si l'équipe se trouve dans les cinq premiers au classement, car tout est encore jouable «mathématiquement».
La conclusion sur ce second limogeage d'un coach au MC Alger durant cette saison 2015-2016, c'est que c'est surtout la «pression des supporters» qui a fait limoger Ighil alors que son président ne cessait depuis le début de la «crise entre Ighil et les supporters» qu'il soutient son entraîneur. Et là, une autre observation s'impose. Celle-ci ne concerne pas seulement le MCA, mais toutes les équipes. En effet, il y a une sorte de règle qui s'est établie: à chaque fois qu'un président de club insiste plusieurs fois en soulignant qu'il soutient son coach, ce même coach est limogé. Et c'est donc aujourd'hui le cas de Meziane Ighil. L'argument du limogeage est simple: l'ancien sélectionneur de l'équipe d'Algérie paie ici les mauvais résultats du MC Alger qui n'a pas réussi à remporter la moindre victoire lors des trois dernières rencontres du championnat. Il est utile de rappeler que l'ancien sélectionneur national avait mené le club à une difficile victoire en remontée face à la JS Kabylie (3-1) lors de la 8e journée, alors qu'il venait la veille de la rencontre de signer son contrat en remplacement du Portugais Artur Jorge.
L'ex-driver du NA Hussein comptait à ce moment énormément sur l'état d'esprit de son groupe en instaurant la discipline et aussi en inculquant le sens de la solidarité à ses joueurs, «deux conditions fondamentales pour la réussite d'une équipe», selon Ighil. Invité à s'exprimer sur les chances de son équipe de jouer la carte du titre comme exigé par le président du club Achour Betrouni, le successeur du Portugais Arthur Jorge a estimé que le Mouloudia, provisoirement deuxième au classement, a «théoriquement tous les atouts» pour postuler au trophée de champion. «Seulement, il faudra redoubler les efforts pour améliorer davantage nos prestations», a-t-il conseillé. Mais juste après, une défaite contre le NAHD (2-1) et voilà que le coach Ighil qui remet en cause la préparation physique d'intersaison de son équipe et ce, à l'issue de la 9e journée du championnat. «Je ne suis pas satisfait de la prestation de mes joueurs. Certes, ils ont tenté de revenir au score en deuxième période, mais leur faiblesse sur le plan physique leur a fait défaut», a déclaré Ighil aux journalistes à l'issue du derby. Sur le plan statistique et sous la responsabilité du coach Ighil Meziane, le MC Alger a enregistré 4 victoires et deux nuls en six matchs alors qu'à l'extérieur, il a enregistré 3 nuls et 3 défaites.
En chiffres et sur les 36 points en jeu, le MCA d'Ighil en a arraché 17 points. Or, il se trouve que lorsque le Mouloudia était sur le podium, les supporters demandaient le départ d'Ighil.
La réponse du président Achour Betrouni était très juste: «Je ne peux pas limoger un entraîneur alors que l'équipe est à la troisième place...» Or, aujourd'hui, l'équipe est à la 5e place soit à deux points du podium, mais cela n'a pas empêché le conseil d'administration du club de se plier à la pression du public! Les Vert et Rouge, qui ambitionnent de jouer la carte du titre cette saison au vu des gros moyens financiers et humains mis à leur disposition par Sonatrach, l'actionnaire principal du club, doivent donc revoir leur copie à la baisse. La raison est toute simple, les observateurs et spécialistes remarquent bien que l'équipe actuelle ne possède pas de ligne d'attaque très performante. Et ajouté au cas de Merzougui qui a été suspendu pour 4 ans à cause du dopage, c'est un autre atout qui fait défaut justement dans ce secteur névralgique, pour ne pas dire déterminant durant cette période de la phase retour qui est elle-même décisive... Pour le moment, et au sujet du nouveau coach de l'équipe, trois noms circulent pour suppléer le départ d'Ighil et ce, dans l'ordre, Zekri, Michel (bien qu'il est actuellement sous contrat avec le CRB! et Menad). Au même moment, le président Betrouni insiste en précisant que «pour le moment, nous n'avons jusque-là contacté aucun autre entraîneur...».