Marketing politique version FLN

Le FLN est entré dans la dernière ligne droite qui mène au rendez-vous des élections législatives. L´occasion lui est offerte pour reconquérir le terrain perdu depuis l´avènement du multipartisme en Algérie. Tous les indicateurs sont favorables au retour aux commandes avec une nette suprématie sur l´ensemble des institutions élues. Mais il se trouve que trop de confiance et de suffisance est accompagné de surprises imparables. Ce qui s´est produit lors des dernières sénatoriales nous renseigne sur l´état des lieux. Le FLN a perdu dans des endroits où il avait la majorité des voix. L´indiscipline a régné en maître dans les structures du parti; indiscipline doublée d´une vulnérabilité certaine qui a donné à l´administration et autres concurrents politiques le pouvoir d´ingérence.
On comprend le courroux de Belkhadem qui est sorti de ses gonds pour dire les quatre vérités à ses militants. En exprimant sa détermination à imposer une discipline partisane irréprochable, le premier responsable du parti est disposé à punir les fauteurs, au risque d´en faire des mécontents.
Fort du soutien inconditionnel de Bouteflika, il sait qu´il a la chance historique de faire sortir le FLN de sa torpeur en lui assignant de nouvelles méthodes de gestion, dans le sens de plus de démocratie, plus d´ouverture sur les jeunes compétences, plus d´adaptation aux développements de la société.
Il est admis que le parti ne peut continuer à fonctionner avec des moyens archaïques au temps de la mondialisation de l´information.
Belkhadem est très conscient des enjeux. Il sait que le FLN est appelé à jouer les premiers rôles; il sait aussi qu´une locomotive déglinguée ne peut traîner des compartiments grincheux à destination. Une fois que la locomotive aura pris sa vitesse de croisière, il n´y aura plus de place aux remises en cause ou aux tergiversations. Le FLN a ainsi ouvert plusieurs chantiers à la fois pour opérer une véritable refonte. Les premiers indices ont été donnés lors du dernier congrès de réunification mais ne font que titres de chapitres à remplir. L´essentiel est donc à venir.
Pour l´équipe de Belkhadem, l´avenir du parti se joue maintenant, à quelques encablures du prochain rendez-vous électoral. Il a constitué des groupes de travail, au nombre de 11, qui planchent sur les lois électorales, les codes de wilaya et des APC, le programme électoral, la stratégie électorale, la communication à tous les niveaux, etc.
Les propositions du FLN relatives au mode électoral sont connues. L´accent est mis sur la réhabilitation des instances élues parce qu´elles sont souvent mal élues ou souffrent du manque de représentativité. Il faut désormais introduire des mécanismes permettant le choix des meilleurs et des plus crédibles dans leurs fiefs électoraux. La conjonction des deux serait souhaitable. Mais à défaut, il faut mettre les balises pour que l´argent n´entre plus jamais dans les considérations politiques. «Le parti a ses valeurs», tient à rappeler Belkhadem. Il met le doigt sur l´absence de morale en politique. A l´avenir, il ne sera plus toléré de bafouer les règles élémentaires de l´éthique. D´où l´utilité de mettre en place des garde-fous pour empêcher la pagaille de régner sur les compartiments du parti des valeurs. Le débat est enveloppé d´une fine couche de sacré. Or, le discours doit être solennel en pareille circonstance pour mieux remettre le puzzle à sa juste place.
Il est vrai que des comportements se sont installés bien avant le début de la crise. Des hommes ont pris en otage mouhafadhas et kasmas comme dans une propriété privée, ont instauré des traditions d´allégeance pour régner durablement. Hélas, toutes ces gentilles personnes doivent partir. Il est temps de le leur dire simplement.
Depuis le début, le FLN n´a appartenu à personne. Il ne peut en aucun cas être privatisé, cinquante-deux ans après sa création. Mais, a-t-on assez de culot pour le leur faire entendre?
L´autre aspect concerne le marketing politique. Belkhadem sait communiquer. Il sait parfaitement comment valoriser l´information et comment l´enrober et comment la transmettre par le biais des vecteurs qu´il choisit selon sa subjectivité. Mais les réseaux de communication sont quasiment inexistants au sein des instances du parti. On a comme l´impression que le staff ne suit pas. Il tente de lui imposer son propre rythme en l´associant à la réflexion sur le système de communication qu´on veut instaurer. Tâche difficile.
Des groupes de travail ont été installés pour réfléchir sur toutes ces questions dans le sens de mettre en place les canaux et les mécanismes de communication internes et avec l´environnement. La campagne électorale sera rude. On en est conscient au FLN. Il faut prendre une longueur d´avance sur les autres en anticipant sur les risques et les défaillances. Riche des dernières expériences «désastreuses», la direction lance des sommations à sa base militante pour que la vigilance soit constante et soutenue tout au long des campagnes qui promettent d´être riches en surprises.
Il y a enfin l´aspect de la stratégie électorale. Le FLN ne peut plus se permettre de rabâcher les slogans creux.
Il doit innover dans le discours et dans la méthode. Il se doit donc d´avoir une idée exacte sur les besoins et les aspirations des citoyens et s´éloigner des promesses vaseuses qu´il ne peut tenir. Là aussi, la lucidité est requise chez ceux qui sont appelés à évaluer les enjeux.
Ce ne sont là que des indices éparses pour illustrer un schéma d´ensemble sur l´opération de charme que le FLN s´emploie à élaborer pour convaincre. Il est majoritaire au Sénat, à l´APN, aux APC et aux APW. Il commande le gouvernement. Il est appelé à faire preuve d´imagination et de bon sens parce qu´il porte la lourde responsabilité d´être tout le temps à l´avant-garde. Lorsqu´on atteint l´âge de la maturité on doit impérativement assumer ses succès comme ses échecs.