«Maladresse et provocation»

Le Vatican est confronté à une vague de protestations et de contestations suite aux déclarations du pape Benoît XVI, portant atteinte à l´Islam. Personnalités religieuses et politiques, associations et médias, n´ont pas digéré les propos du premier responsable de l´Eglise catholique. Le cheikh d´Al-Azhar, plus haute autorité de l´Islam sunnite dans le monde, Mohammed Sayyed Tantaoui, a qualifié les propos du pape Benoît XVI «d´une ignorance claire de l´Islam et de son prophète et suscitent la colère de plus de 1,3 milliard de musulmans dans le monde». Pour cheikh Tantaoui les propos tenus par le pape à propos de l´Islam ne contribuent pas au renforcement du dialogue entre les religions et les civilisations dans le monde. Il a indiqué avoir «convoqué une réunion urgente des membres du Conseil des recherches islamiques, qui dépend d´Al-Azhar, pour rédiger un communiqué réfutant les mensonges que contiennent les propos du pape».
Lui emboîtant le pas, le grand mufti d´Arabie Saoudite, cheikh Abdelaziz Al-Cheikh, a affirmé que de tels commentaires sont des «mensonges» et risquent d´envenimer les rapports entre les deux religions. «L´Islam n´a rien à voir avec le terrorisme», a dit le mufti. Et d´ajouter: «L´Islam est une religion de tolérance qui ne prêche pas la violence ni le terrorisme.»
La presse mondiale a, évidemment, largement commenté les propos du pape. Maladresse ou provocation? C´est dans ce contexte que les médias internationaux ont abordé le sujet. Si les journaux arabo-musulmans ont catégoriquement rejeté, voire même dénoncé les propos du pape, la presse occidentale a été partagée entre presse partisane et opposante.
Dans son édito, le New York Times a condamné les déclarations du pape. «Le monde écoute attentivement les paroles de tout pape. Et c´est tragique et dangereux quand l´un d´eux sème la douleur, délibérément ou négligemment. Il doit présenter des excuses profondes et convaincantes, montrant que les mots peuvent aussi apaiser». De son côté, le quotidien portugais Diario de Noticias, écrit:«Si Benoît XVI pense que mettre en cause des sensibilités religieuses favorise la tolérance qu´il réclame, il se trompe». Evoquant le sujet dans son édition précédente, le quotidien français Libération a mentionné que «le nouveau pape se voit comme un missionnaire dans une Europe dominée par l´incroyance».
Le quotidien considère les propos du pape comme une maladresse diplomatique et politique majeure.
Contrairement à leurs confrères américains et français, les journaux anglais, autrichiens, italiens et quelques titres de la presse allemande, se sont fait les avocats du pape. «Pourquoi ces musulmans haïssent-ils notre pape?», s´est interrogé le quotidien populaire allemand Bild. La presse britannique prend plus nettement la défense de Benoît XVI, estimant que son propos a été détourné et mal interprété. «Il n´est pas surprenant que (ses commentaires) aient offensé», a commenté le Guardian. Dans la presse autrichienne, très catholique, le quotidien indépendant Kurier a défendu, bec et ongles, Benoît XVI. «Le soulèvement (réflexe) d´une partie du monde musulman s´explique par un raccourci volontaire du discours du pape et une ignorance de sa véritable intention», estime le journal.
Le quotidien espagnol, El Pais, estime que «le discours du pape, en tant que réflexion contre le fanatisme religieux, aura pour seul effet immédiat d´aggraver ce phénomène». Enfin, la presse italienne n´a pas manqué l´événement.
Le quotidien des évêques italiens a vivement pris la défense du pape, estimant que le discours, qui a provoqué une vague d´indignations dans le monde musulman n´a «pas été lu intégralement» et est «en harmonie avec la tradition musulmane». A signaler que plusieurs pays musulmans ont connu des manifestations pacifiques pour dénoncer les propos du pape.