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Sahara occidental

La politique de Rabat met en péril la région

La grave crise entre l'Algérie et le Maroc au sujet du Sahara occidental s'est transformée en une guerre d'usure diplomatique qui dépasse la région et fait craindre une déflagration, selon des analystes.

Enhardi par la reconnaissance unilatérale par l'administration de Donald Trump fin 2020 de sa prétendue souveraineté sur le Sahara occidental en contrepartie d'un rapprochement avec Israël, le Maroc déploie depuis une diplomatie de plus en plus agressive pour rallier d'autres pays à ses positions.
Le roi Mohammed VI a averti en août qu'un tel soutien ne devait «prêter à aucune équivoque», affirmant que le dossier du Sahara était «le prisme à travers lequel le Maroc considère son environnement international».
En face, l'Algérie continue d'afficher son soutien indéfectible au Front Polisario et à la République sahraouie, membre fondateur de l'Union africaine. Alger met aussi à profit son statut d'exportateur gazier choyé par l'Europe cherchant à compenser le gaz russe pour marquer des points face au Makhzen avec lequel il a rompu les relations en août 2021. «Nous assistons à une guerre diplomatique dans laquelle les deux parties usent de tous les moyens sans aller jusqu'à un conflit ouvert», estime Riccardo Fabiani, spécialiste de l'Afrique du Nord à l'International Crisis Group (ICG).
Le dernier épisode de cet affrontement diplomatique a eu lieu, fin août, lorsque le Maroc a rappelé pour consultations son ambassadeur en Tunisie après que le président Kaïs Saïed a reçu le chef du Polisario, Brahim Ghali, à l'occasion d'un sommet économique Japon-Afrique. Cet incident montre que «le conflit au Sahara occidental commence à avoir des répercussions en dehors du cadre régional», souligne Fabiani. L'hospitalisation de Ghali en Espagne en avril 2021 avait provoqué une grave crise entre Madrid et Rabat, culminant avec l'entrée le mois suivant de plus de 10000 migrants en 24 heures dans l'enclave espagnole de Ceuta, à la faveur d'un relâchement des contrôles frontaliers côté marocain. Madrid a mis fin à cette crise en s'alignant en mars sur le plan marocain de la prétendue autonomie pour le Sahara occidental, ancienne colonie espagnole contrôlée à 80% par Rabat. Le Polisario réclame un référendum d'autodétermination sous l'égide de l'ONU dont les résolutions consacrent la tenue incontournable du scrutin auquel a droit le peuple sahraoui.
En réaction au revirement de Madrid, l'Algérie a suspendu sa coopération avec l'Espagne, rappelé son ambassadeur et évoqué une hausse des prix du gaz algérien livré à l'Espagne.
Un cessez-le-feu au Sahara occidental en vigueur depuis 1991 avait volé en éclats en novembre 2020 après l'agression de troupes marocaines, à l'extrême sud du territoire sahraoui occupé, contre des civils sahraouis qui bloquaient la route, ouverte illégalement, vers la Mauritanie. La tension est encore montée en novembre 2021 après que l'Algérie a fait état d'un bombardement marocain qui a causé la mort de trois camionneurs algériens en territoire sahraoui. Pour Fabiani, la reconnaissance par Trump de la prétendue souveraineté marocaine sur le Sahara en contrepartie d'une normalisation avec Israël, au grand dam d'Alger, a «réactivé un conflit qui était gelé pendant longtemps».
Situé sur la côte Atlantique, le Sahara occidental (266000 km2) est riche en phosphates et doté d'un littoral très poissonneux de plus de 1000 km, des ressources illégalement exploitées de manière intensive par le royaume marocain et ses parrains européens et occidentaux. «Pendant la décennie écoulée, le Maroc a lancé sa diplomatie agressive, notamment en Afrique et envers certains pays de l'Union européenne (UE) alors que l'Algérie était à la traîne», décortique Dalia Ghanem, de l'Institut d'études de sécurité de l'UE (IESUE).
L'Algérie, forte de sa richesse gazière mise en valeur par le conflit en Ukraine, «entend renforcer son rôle dans la région et devenir leader en Afrique», estime-t-elle.
L'émissaire de l'ONU pour le Sahara occidental, Staffan de Mistura, a effectué ce week-end une nouvelle visite dans la région, sans le moindre signe d'une possible reprise du dialogue en suspens depuis plusieurs années.
«Le risque d'un conflit militaire est faible car aucune des deux parties ne le souhaite. Mais cela ne doit pas être sous-estimé, il suffit d'un incident frontalier et d'un mauvais calcul», met en garde Fabiani, l'expert de l'ICG.

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