L'Expression

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Le Café, ce lieu de liberté et de création

Le café, lieu magique et boisson énergisante, nous interpelle en permanence! Faire la sociologie du café c'est faire toute la sociologie des intellectuels, voire celle d'une société intégrale depuis l'âge des Lumières.

On ne se rend pas dans un café pour siroter une tasse de café ou pour déguster un verre de thé, c'est un acte plus profond que cela. Le café n'est pas un lieu de consommation, mais un lieu de culturation. Une maison de débats et de rencontres. Le café est un miroir de la mémoire collective et individuelle. Il est plus influent qu'une université, plus actif qu'un parti politique. Plus houleux qu'un Parlement élu démocratiquement. Si l'université accueille une tranche d'âge de la société pour une période de quatre ou cinq ans, le café est une école ouverte pour toutes les générations et en temps réel. Si les partis politiques accueillent des militants clonés pour constituer un troupeau, le café est un carrefour de toutes les sensibilités politiques. Le chaos fécond et discipliné!
Dans le café, autour de cette boisson noire qui fut interdite, haram et illicite, à un certain temps se réunissaient les philosophes, les poètes, les musiciens, les chanteurs, les plasticiens, les cinéastes... et les citoyens lambda.
Les éveilleurs de la conscience, les défenseurs de la liberté d'expression et d'opinion, les anarchistes, les conformistes, les bourgeois, les communistes et tant d'autres sensibilités ont tous trouvé, à travers l'Histoire et la géographie, dans le café, un havre et un parloir.
Dans les nuages de la fumée des cigarettes, le plaisir de la boisson et de la musique, les bavardages du comptoir sont des livres pleins de vérités et de rêves. Au café on raconte le génie du peuple sans tabous et sans remords. Le café est un divan!
C'est au café que sont nées les grandes théories qui ont changé le monde. C'est au café où sont nés les meilleurs poèmes, les meilleures musiques, les meilleurs films et les meilleures histoires d'amour. C'est au café que sont nés les philosophies; l'existentialisme, le surréalisme, le cubisme, le nihilisme, le marxisme. Au café sont nées les révolutions. Le café représente le contre-pouvoir.
Il y a des villes qui sont connues et renommées par leurs cafés ancestraux; Alger par Tantonville et Malakoff, Oran par Sentra, Constantine par Nedjma, Paris par le café de flore, Rome par Antico Caffè Greco, Le Caire par café El-Fishawy, Damas par le café Nawfara, Beyrouth par le café des glaces, Tunis par le café El Enba...
Chez nous, en Algérie, à l'aube de l'indépendance, nous avons hérité de la France coloniale un butin de guerre inestimable en matière de cafés. Des établissements flamboyants construits dans des multiples architectures, Andalouse, mauresque, ottomane, haussmannienne et moderne, dans toutes les villes et les villages. Des établissements qui faisaient la beauté des cités et le livre d'or de leurs Mémoires. Mais au bout d'une décennie nous les avons massacrés, démolis, métamorphosés.
Dans quelques-uns de ces cafés sont nés quelques partis du Mouvement national, lieux où la révolution algérienne a marqué des coups durs au colonisateur.
Aujourd'hui nos cafés maures sont morts! Ils sont sans vie, sans arts et sans politique.
Jadis Tantonville, Malakoff, Etlemçani, la Brass de la fac, Lotus (n'existe plus)... étaient des lieux qui grouillaient d'intellectuels, d'universitaires et d'artistes; El Anka, Gerouabi, Hssissene, Djamel Amrani, Jean Sénac, Djamel eddine Bencheikh, Tahar Ouettar, Tahar Benaïcha,Mahieddine Bachtarzi, Kaltoum, Mohamed Racim, Yamina Mechakra, Mohamed Harbi, Mohamed Boudia, Mohamed Benguettaf,Abdelmadjid Meskoud, Kateb Yacine, Amar Ezzahi, Mustapha Kateb, Ahlem Mostaghanemi, Rachid Boudjedra, Reda Doumaz Aujourd'hui ces lieux sont désertés ou presque par les faiseurs de la joie, de la réflexion et de la révolution.
Sous d'autres cieux, les cafés sont le déclic pour beaucoup de romans, de films, de beaux livres et de pièces théâtrales; qui n'a pas lu le magnifique roman «L'assommoir» de Zola? Chez nous peu d'écrivains ont célébré ces lieux magiques à l'image de Mohammed Dib dans son recueil de nouvelles «Au café», de Kaddour M'Hamsadji dans son roman intitulé «Le petit café de mon père» ou El Habib Sayeh dans son roman «Zaman Nimroud» (Le temps du Nimroud)...
Pour faire face à ce saignement culturel et urbain, l'État, de toute urgence, est appelé à inscrire ces lieux sur la liste du patrimoine national afin de les sauvegarder. Il doit accompagner leurs propriétaires dans toute opération de restauration afin de garder la mémoire d'une ville, l'histoire d'un pays et l'ambiance culturelle citadine.

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