Vendetta à la kabyle
Mais qui a donc osé souiller le sacro-saint temple inviolable de la JSK? Plus qu´un parti, plus qu´un lobby, ce club créé à la fin des années 30, qui a survécu à tous les avatars, est, aujourd´hui, un vrai culte pour une jeunesse en mal de repères. Dans la conscience collective de cette région, aujourd´hui si tourmentée, la JSK est le symbole de la fierté et de toutes les espérances que peut incarner la performance sportive. Les ârchs n´ont-ils pas transgressé une règle non écrite en s´attaquant directement, au soir de sa victoire, à ce club qui est, sans conteste, une légende mythique de l´histoire de la Kabylie depuis la période coloniale? L´outrage commis est irréparable !
Aucun Kabyle n´aurait imaginé, un seul instant, que des hooligans s´en prendraient à ce prestigieux club de football qui fait la fierté de toute l´Algérie. Le mal est fait. Et à lui seul, s´il provoque déjà la réprobation unanime de l´opinion, cela explique bien pourquoi la réaction des supporters et des dirigeants de la JSK sera rude.
On ne touche pas impunément aux vieilles icônes. Et il ne manque pas de gens pour vilipender un tel acte en soutenant que c´est presque l´honneur kabyle qui vient d´être ainsi castré.
Hannachi, le boss de la JSK, jure par tous ses saints qu´il ne laissera pas ce crime impuni.
L´arrogance des ârchs ne lui fait pas peur. C´est un homme d´honneur. Et l´on est enclin à prendre ses menaces pour argent comptant. Ceux qui le connaissent bien sont persuadés , sans l´ombre d´un doute, qu´il exercera, sous la pression de la rue, un légitime droit de poursuite avec le sentiment d´accomplir une oeuvre d´assainissement dans une région survoltée et malmenée depuis quelques mois, par un vrai brigandage moral.
La JSK n´est-elle pas la seule «institution» qui a l´avantage de rassembler autour d´elle tous les Kabyles sans distinction? Ni le FFS ni le RCD n´ont pu, à aucun moment, réussir à pénétrer et à contrôler ce club si convoité qui fait battre à l´unisson les coeurs de tous les Kabyles. Hannachi y veille. La JSK est apolitique. Elle le restera. Et c´est là le mode d´emploi sur lequel fonctionne ce club.
En croisant le fer avec les ârchs, Moh-Cherif Hannachi sait d´avance que toute la population se ralliera à son combat au moment même où déjà un fort mouvement de mécontentement se développe dans une région aujourd´hui compartimentée en divers îlots partisans et tendances culturelles. Trop, c´est trop ! Sur le chemin des ârchs vient de se dresser ainsi le seul et vrai obstacle susceptible de les faire trébucher depuis qu´ils ont décidé, contre toute raison, de jouer au Ponce Pilate.
Ces actes de vandalisme suscitent bien des interrogations. Peuvent-ils être le fait du hasard lorsque l´on sait qu´ils interviennent quelques jours seulement après les incidents de Béjaïa au cours desquels des joueurs du CRB ont été agressés?
N´y a-t-il pas là tous les indices d´une machination politique à l´état larvé?
La crise qui oppose les ârchs à la JSK accusera-t-elle, dans les jours à venir, une nouvelle tournure? Ne court-elle pas le risque d´être exploitée d´abord par tous ceux que les ârchs dérangent dans leur ascension, à commencer par les partis d´ancrage régional, afin de diaboliser ce mouvement citoyen à l´approche des prochaines échéances électorales?
Hannachi joue sur un terrain où il est foncièrement convaincu qu´il a toutes les chances de faire mordre la poussière à son adversaire. Parce qu´il est un personnage craint et respecté, il a tous les droits aujourd´hui d´exiger que cette offense soit réparée.
C´est ainsi que partout naissent toutes les vendettas. Y compris en Kabylie.
