Tourisme et mirages
La soudaine disparition de touristes européens dans notre Grand-Sud est, à bien des égards, bizarre. Les derniers chiffres révèlent qu´ils sont 31, entre Allemands, Autrichiens, Suisses, Néerlandais et Suédois, à avoir disparu. Et cela en l´espace de deux mois. On parle d´enlèvements, de rançons, de terrorisme, mais sans aucun fait établi. Des «bédouins» auraient aperçu des «otages» avec leurs «ravisseurs», rapporte un journal européen, (repris, toute honte bue, par certains confrères algériens alors que nous sommes plus de 3500 journalistes à couvrir le pays) aussitôt démenti par le gouvernement de son pays. Thèse et antithèse venant de l´étranger. Pas un de nos responsables du secteur n´a voulu sacrifier sa longue sieste. Aucune réaction de leur part pour tenter d´enrayer la néfaste campagne entreprise.
Car, enfin, on ne traverse pas les mers et les océans les doigts dans le nez. Il en va de même pour le désert. De telles traversées répondent à des normes et à des conditions drastiques. Tous les candidats à l´aventure le savent. Y compris les 31 touristes européens en question. Pourquoi seraient-ils partis sans signaler leur départ aux autorités, sans guides? Tout cela est vraiment bizarre.
Cela dit, le seul fait établi est qu´une telle affaire porte un sérieux coup à notre tourisme saharien. Le seul qui nous soit resté après que nous ayons sabordé toute autre forme de tourisme chez nous dont Dieu seul sait tout le potentiel qu´il recèle. La décennie de terrorisme qui a suivi, a balayé les quelques miettes qui restaient.
Selon l´Organisation internationale du tourisme (OMT), les recettes mondiales générées par le tourisme international ont atteint, en 1997, 443 milliards de dollars. Alors que dans le même temps, pas un seul de ces billets verts n´est tombé dans notre escarcelle. L´OMT prévoit, aussi, qu´à l´horizon 2015, le tourisme devrait devenir la première activité économique à l´échelle mondiale, dépassant le commerce des produits énergétiques et des biens manufacturés.
Du coup on mesure mieux les enjeux. Surtout qu´après les attentats du 11 septembre et la guerre du Golfe-bis, notre Sahara, contrairement aux autres destinations dans le monde, avait toutes les chances d´être plein d´attrait, ne voilà-t-il pas que surgit cette affaire de touristes «kidnappés».
On veut bien faire les idiots et attribuer ces «disparitions» au hasard, mais quand on est en face d´un scénario de crime sans cadavre, de supputations à la place de preuves comme autant de mirages, il est difficile de se complaire dans le jeu.
