Le retour de l’Afro-Asiatisme
Déçues par une mondialisation voulue par l´Occident sans elles, l´Algérie en particulier et l´Afrique en général, se tournent résolument vers l´Asie. La quatrième conférence internationale de Tokyo sur le développement de l´Afrique (Ticad IV) qui s´est achevée, vendredi dernier, à Yokohama (Japon), n´est que l´un des instruments mis en place pour une étroite et nouvelle coopération entre l´Asie et l´Afrique.
Il y a aussi le Fonds Inde-Afrique créé en 2003 qui octroie quelque 200 millions de dollars à l´Afrique dans le cadre du Nepad, la Chine qui est, de plus en plus, présente en Afrique et qui s´est distinguée par l´annulation de près d´un milliard et demi de dollars de la dette que lui devaient 31 pays d´Afrique. On peut aussi citer la Corée, la Malaisie etc. Toute cette aide asiatique en direction de l´Afrique a cette particularité de ne pas être assortie de conditions que n´hésite pas à imposer l´Occident comme l´exigence d´une libéralisation au pas de charge avec réduction du rôle de l´Etat ou, mieux encore, le fameux concept mitterrandien «Démocratie contre aide au développement».
En réalité, ce rapprochement entre ces deux continents ne date pas d´aujourd´hui. Il a pris naissance il y a plus d´un demi-siècle à Bandung en Indonésie. Il était devenu nécessaire avec la bipolarisation Est-Ouest qui prévalait à l´époque. A la fin de la guerre froide, l´esprit de Bandung avait quelque peu perdu de son souffle. C´est pourquoi au Sommet afro-asiatique tenu en avril 2005 à Djakarta (Indonésie), le Président Bouteflika a plaidé pour «la renaissance de l´Afro-Asiatisme, celui du nouveau souffle de Bandung».
Si les dirigeants tant africains qu´asiatiques se sont mis d´accord pour un partenariat stratégique en matière économique, le dialogue des civilisations n´en est pas pour autant perdu de vue, comme l´a si bien exposé le Président Bouteflika toujours à Djakarta. «Pris dans l´urgence d´un dialogue avec l´Occident riche et nanti... nous avons négligé de nous enrichir de nos mutuelles différences...Nous dialoguerons mieux avec les autres si nous dialoguons en même temps fraternellement entre nous, héritiers des grandes traditions spirituelles...L´Occident dialoguera mieux avec nous, de manière plus ouverte et plus autocritique, quand il prendra conscience que l´immense majorité des peuples de la planète...ne veut pas s´identifier à sa représentation de l´humain...», avait-il notamment déclaré. On ne peut être plus clair.
Une nouvelle stratégie qui évitera aux pays d´Afrique de faire les frais d´un occident empêtré dans une crise multiforme et qui n´a ni les moyens ni la volonté de penser aux faibles et aux moins nantis de la planète.
Une nouvelle stratégie enfin qui leur évitera d´être «broyés» par une mondialisation qui déjà les a exclus. Une mondialisation unilatérale dont les acteurs ne doivent pas voir d´un bon oeil cette renaissance de l´Afro-Asiatisme. C´est le moins qu´on puisse dire.
