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LES ALGÉRIENNES DU CHÂTEAU D'AMBOISE

Un témoignage édifiant sur les atrocités du système colonial

Dans son désir de rendre un hommage particulier à ces oubliées de l'histoire, l'auteure interpelle la mémoire collective et appelle au devoir de transmission de l'histoire pour que nul n'oublie ces femmes.

Une rencontre a été organisée vendredi soir au Centre culturel algérien (CCA) à Paris autour de l'ouvrage Les Algériennes du château d'Amboise de Amel Chaouati, qui nous renseigne sur les conditions sanitaires déplorables imposées aux membres de la famille de l'Emir Abdelkader en captivité en France et surtout sur les atrocités du système colonial contre les Algériens L'ouvrage en question consacré à l'Emir Abdelkader et à la famille de ce chef spirituel et militaire, héros de la résistance coloniale, dont les écrits constituent dans la mémoire collective les fondements de l'Etat moderne algérien, aborde surtout, un pan occulté de l'histoire de ce valeureux guerrier. Celle-ci va au-delà de la dimension du héros de guerre et penseur soufi, pour dévoiler le versant humain de sa personnalité, celle d'un homme qui voulait sauver les siens d'une mort certaine, suite aux nombreuses années de captivité et de privation de liberté, imposée par la France coloniale. En décembre 1848, après des combats courageux et acharnés contre l'armée française, l'Emir Abdelkader se retrouve en captivité, lui et toute sa famille composée de quatre-vingt-dix-sept personnes dont vingt et une femmes, quinze enfants et de nombreux nourrissons, en France, où ils seront enfermés après une traversée très éprouvante.
Durant près de cinq ans, soit trois mois à Toulon, sept mois à Pau puis quatre ans au château d'Amboise, jusqu'à leur libération en 1852 où l'Emir, et ce qui resta de sa suite, allaient s'exiler en Turquie avant de se rendre à Damas, l'enfermement fut loin d'être une villégiature, mais un véritable mouroir où périrent vingt-cinq membres de la famille de l'Emir, particulièrement des femmes et des enfants en bas âge. L'auteur de l'ouvrage, psychologue de formation, a mis sept ans pour réunir les matériaux nécessaires à ce travail de recherche inédit pour revenir sur les traces de cet exil forcé et douloureux imposé à l'Emir et sa famille, en épluchant les archives, parcourant les villes, enchaînant les voyages et les rencontres, interrogeant des sources édifiantes pour reconstituer ces fragments de vie. Les souffrances endurées par ces femmes qui furent arrachées brutalement à leurs familles, leur pays, pour se retrouver transplantées dans des lieux qui leur sont totalement étrangers où elles furent recluses, et impuissantes, ont vu leurs enfants périr, a particulièrement capté l'intérêt de Amel Chaouati.
Dans son désir de rendre un hommage particulier à ces oubliées de l'histoire, l'auteur interpelle la mémoire collective et appelle au devoir de transmission de l'histoire pour que nul n'oublie ces femmes dont l'équilibre psychique et la santé physique furent sérieusement affectés et qui pour beaucoup, payèrent de leur vie et de celle de leurs enfants en bas âge, nés pour la plupart en captivité. Ces femmes avaient comprise aussi qu'il fallait apprendre à survivre, à préserver leurs traditions de femmes arabes et musulmanes.
Les prières, le Ramadhan, les fêtes de l'Aïd rythmaient le passage des années, marquées par un climat rude, l'exil, les séparations, et les deuils fréquents. Puisant dans ses souvenirs et ses émotions, ou ses nombreuses rencontres, citant des passages de documents précis (rapports d'inspection, lettres à) ou des passages de livres sur l'Emir Abdelkader, Amel Chaouati révèle que l'emprisonnement de l'Emir Abdelkader et sa suite par la France coloniale fut traumatique pour tous et d'une violence psychologique importante.
Se présentant comme un journal de bord relatant la genèse et le déroulement des investigations de l'auteur, Les Algériennes du château d'Amboise, démontre que la situation géographique et la rareté des visites avaient aggravé leur isolement. Les épreuves causées par la mort de plusieurs personnes, les conditions de leurs inhumations, la longue durée d'enfermement, ont été source de crise de folie et de nombreuses maladies somatiques pour les femmes plus que pour les hommes, rapporte l'auteur s'appuyant sur les archives recueillies durant des années.
«En écrivant ce livre, j'ai voulu rendre un hommage à ces oubliées de l'histoire, et compléter celui rendu par le plasticien algérien Rachid Koraichi», a confié Amel Chaouati au public. Celui-ci, a-t-elle dit, avait créé dans le parc du château d'Amboise «Le jardin d'Orient», une installation cimetière, redonnant une individualité aux 25 personnes de la suite de l'Emir enterrées dans une fosse commune, dont la mort n'avait jamais été enregistrée sur les registres d'état-civil, mais dont témoignait une stèle érigée en 1853 par les habitants d'Amboise.

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