Eradication des haouchs à Bouira
Une réalité qui met du baume aux coeurs
Le recensement réalisé par les services publics fait état de moins de 110 familles à travers la totalité des haouchs de Bouira.
En décidant de concrétiser l’opération, le wali veut faire oublier des « années de braises » vécues bien avant l’independance par les familles et une année 2020 des plus tristes à mettre vite aux oubliettes. Il veut aussi que le Ramadhan de cette année soit différent pour les 110 familles qui vivaient dans des taudis, en attendant le même sort pour 903 familles concernées par la liste du logement locatif public qui sera affichée incessamment.
D’autres listes seront publiées dans les mois à venir pour les 1300 logements en réalisation. 75 familles occupent, depuis samedi, de nouvelles habitations. L’opération « éradication de l’habitat précaire » concerne, selon le premier magistrat de la ville, Larbi Mohamed, neuf haouchs qui sont occupés par 75 familles. C’est une vidéo postée sur les réseaux sociaux, il y a une année, par un jeune de Bouira, mort récemment, qui aura fait bouger les choses.
Comme à chaque occasion, les mauvaises langues et les opportunistes de tout bord saisissent l’occasion pour en faire un fonds de commerce d’ordre politique. Un parti politique qui s’affiche par ses députés et ses élus bien rémunérés par le Trésor public, aux premières loges des marches, chaque vendredi, lesquels reprennent en chœur l’appel du jeune défunt qui exigeait un appartement et qui parlait aussi de ces gens venus habiter avec lui dans le haouch, qui bénéficiaient de logements, ensuite partaient, mais étaient remplacés par d’autres…ces donneurs de leçons n’ont pas réagi il y a une année. Devant cette situation, les pouvoirs publics et à leur tête le wali de Bouira prennent les choses en charge et invitent les propriétaires autour d’une table. Cela parce que le problème relève de la santé publique avec les risques d’épidémie, de la mise en danger de la vie d’autrui avec les risques de mort à la moindre catastrophe naturelle. L’administration se retrouve en position de force quand elle décide de prendre en charge les occupants, la démolition et le transfert des gravats. Les propriétaires n’ont plus aucun argument à faire valoir. Comme chacun le sait et déjà rapporté dans notre journal, le manque de foncier urbain, qui se fait de plus en plus pressant, a amené l’actuelle direction de la wilaya à réserver pas moins de 80 logements déjà prêts et 131 en réalisation pour l’opération d’éradication des haouchs.
Pour éviter les erreurs du passé, une commission élargie aux propriétaires, les pouvoirs publics, les élus, suit en permanence les préalables nécessaires à l’éradication de ce vieux bâti qui n’offre même pas les conditions élémentaires à une vie décente. Le nouveau wali, Lakhal Ayat Abdeslem, qui agit sans trop de tapage médiatique, dépoussière ce dossier qui écume les tiroirs de l’administration depuis maintenant plusieurs décennies. La raison essentielle du retard dans l’épuration de ce dossier est dû à la position des propriétaires qui, à chaque fois, essayent de tirer un maximum et profitent de la bonté de l’Etat. Le recensement réalisé par les services publics fait état de moins de 110 familles à travers la totalité des haouchs de Bouira.
La wilaya vient de retenir 241 logements dans le cadre du programme de résorption de l’habitat précaire. Les propriétaires, maintenant, sont astreints à un cahier des charges qui définit la consistance, le gabarit et le respect de l’uniformité des constructions. La décision d’éradiquer le vieux bâti, doit toutefois respecter l’histoire de la ville. Rénover une ville est une bonne chose, anéantir son histoire est son contraire. Ce paradoxe s’applique à la ville de Bouira. Les édifices qui font partie de son identité disparaissent un à un. Le dernier en date reste la cité Ainouche Hadjila, un repère pour les Bouiris. Sa démolition est certes, devenue une nécessité eue égard à l’insalubrité, l’exiguïté et la proximité que subissaient les centaines de familles entassées dans des appartements de quelques mètres carrés où s’entassaient quelquefois deux à trois couples de la même famille. Sa démolition dans le cadre de la résorption de l’habitat précaire est une aubaine. Le débat aujourd’hui est autour du devenir de cet espace situé au centre-ville de Bouira. Disparue des regards, cette cité a laissé un vide. Construite dans le cadre du plan de Constantine cher à De Gaulle, elle a servi de dortoir aux forces d’occupation coloniales. L’assiette vient d’être récupérée alors qu’elle était convoitée par les lobbies du foncier. Si le débat est plutôt favorable à son éradication, certains habitants ont souhaité garder une trace de ce pan de l’histoire de la ville et du pays. L’utilité semble avoir pris le dessus dans ce cas. Un autre site historique se trouve juste en face du haouch éradiqué des Abdelaziz, il s’agit du Hammam Sidhoum. Ce lieu a servi de refuge aux moudjahidine. Le Mouloudia de Bouira ainsi que la première section des Scouts musulmans algériens ont été créés dans ce local qui, aujourd’hui, se dégrade de plus en plus.
Situé sur le boulevard central de la ville, ce Hammam est connu de tous les natifs de la ville. Chacun a une histoire à raconter. Parce qu’il est un pan de l’histoire, l’héritier, le docteur Lamine Sidhoum sollicite les pouvoirs publics pour sa réhabilitation et sa transformation en musée. La nature juridique du site, une propriété privée, ne s’appose pas au projet surtout que le propriétaire dit être prêt à le céder à la wilaya à condition de l’affecter à ce projet de musée. Précisons pour ceux qui ne le savent pas, Hacène Sidhoum, le père, est un des membres fondateurs du Mouloudia de Bouira, mais aussi de la première section scouts de Bouira. Les créations ont été faites dans ce hammam qui, pendant des années, a abrité des révolutionnaires comme Hocine Ait Ahmed, le moudjahid Hechaichi, les Chahid Chaïd, Bourouba Saïd… des passagers, des sans-abri. Les citoyens demandent la concrétisation de ce projet sur le modèle de celui de Sour El Ghozlane créé par feu Saïki. Ce site est l’un des derniers vestiges qui retracent l’histoire de la ville en même temps que le CEG Ibn Khaldoun, les locaux fermés du deuxième bureau.