RÉDUCTION DES IMPORTATIONS
L'éternel challenge du gouvernement
Ahmed Ouyahia présente la réduction des importations comme une affaire de vie ou de mort.
L'Algérie reste et restera pour longtemps encore dépendante de la rente pétrolière et son marché pris en otage par les importations. Le gouvernement peine à l'avouer mais cette triste réalité est confirmée par ses services et ses institutions. Le gouvernement a échoué dans plusieurs secteurs, mais la plus grande défaillance demeure son incapacité à réduire les importations; l'épine dorsale de son programme.
Le chiffre communiqué récemment par le Cnis fait peur, il prélude le pire. Durant les six premiers mois de l'année en cours, l'Algérie a importé pour plus de 23 milliards de dollars, contre 20 milliards de dollars durant la même période de 2010.
Ces statistiques pouvaient passer inaperçues si le gouvernement de Ahmed Ouyahia ne présentait pas la réduction des importations comme une affaire de vie ou de mort.
L'Exécutif pensait opter pour une démarche objective en favorisant les entreprises nationales à verrouiller l'investissement étranger, imposer des lourdeurs administratives sur les opérations d'importation, et puis supprimer les crédits de consommation majoritairement dédiés à l'achat de véhicules. Mais voilà que trois ans après avoir entamé ce processus, le staff de Ouyahia découvre que l'objectif préalablement fixé est très loin d'être atteint. Plus grave encore, c'est l'effet inverse qui est en train de se produire.
Prenons l'exemple de la voiture. Le gouvernement oblige les banques agréées nationales et étrangères à bloquer le crédit auto qui profite soi-disant aux concessionnaires, croyant dissuader les Algériens d'acheter des voitures neuves sachant pertinemment que le pouvoir d'achat du citoyen est faible et ne pourra pas supporter une telle dépense. Erreur.
Les importations de véhicules vers l'Algérie se sont établies en hausse de 33,66% au 1er semestre 2011, soit 176.901 véhicules contre 132.351 à la même période en 2010 avec une progression en valeur à 132,2 milliards de dinars.
Idem pour les importations de blé qui ont enregistré une forte hausse de 128,1% à 1,51 milliard de dollars au 1er semestre de 2011 contre 664,85 millions de dollars à la même période en 2010.
Les importations algériennes de produits alimentaires ont enregistré durant le 1er semestre 2011 une progression de plus de 59%, tirée à la hausse essentiellement par les céréales dont les achats ont augmenté de plus de 99% à 2,04 milliards de dollars. Le gouvernement justifie cela par l'augmentation de la consommation nationale. Comme si les Algériens commettraient un pêché en se rabattant sur le blé. Cela au lieu de reconnaître l'échec des plans de développement consacrés à l'agriculture qui ont coûté des milliards de dollars aux caisses de l'Etat.
Le gouvernement continue à trouver des excuses pour ces échecs, mais l'économie nationale supportera-t-elle encore long-sûr.
Le ministre des Finances, Karim Djoudi, a fait un aveu grave: «Dans nos projections, à moyen terme, le budget de l'Algérie est soutenable jusqu'en 2014/2015», a-t-il déclaré récemment. Les projections du gouvernement se basent donc sur quatre ans, l'Exécutif gère le budget de l'Etat comme on gère un budget de famille mettant en danger les ressources financières du pays.
La paix sociale coûte très cher au pouvoir et coûtera beaucoup plus cher au pays en 2016 puisque ce n'est surtout pas l'augmentation de la fiscalité non pétrolière de plus de 20%, ces dernières années, qui permettra d'atténuer l'impact sur le budget de fonctionnement. Et ce n'est pas dans les trois prochaines années que l'économie algérienne rattrapera un retard de développement de plusieurs décennies, comme le prétend Djoudi, qui affirme: «Aujourd'hui, l'important pour nous, c'est de faire que la ressource publique soit un levier de la croissance économique, de la création d'emplois et pour un plus grand équilibre sur les finances.»