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SMAÏL MIMOUN, MINISTRE DU TOURISME ET DE L'ARTISANAT, À L'EXPRESSION

«Le tourisme c'est l'affaire de tout le monde»

Dans cet entretien accordé à L'Expression, le ministre revient sur les principales préoccupations du secteur. Mimoun nie tout blocage des projets touristiques, affirme qu'en aucun cas le tourisme en Algérie n'est tenté de tirer profit de la situation de trouble qui prévaut à ses frontières et reconnaît que les prestations de services et la formation sont les maillons faibles de la chaîne du tourisme.

L'Expression: Le secteur du tourisme en Algérie peine à prendre son envol en dépit des nombreux programmes mis en place. Au centre de toutes les polémiques, le blocage des projets touristiques algériens et étrangers. Certaines informations font état de l'intervention personnelle du Premier ministre pour débloquer la situation...
Smaïl Mimoun: Je ne partage pas votre opinion concernant le blocage des projets touristiques. Bien au contraire, ces dernières années ont vu la validation de plusieurs projets qui permettront, une fois achevés, d'augmenter la capacité d'accueil qui ne dépasse pas actuellement les 90.000 lits, mais feront aussi partie de notre stratégie pour la promotion de la destination algérienne.
Rassurez-vous, il n' y a aucun blocage. Parmi les principaux projets, deux seront réalisés par les Emiratis pour un montant atteignant les 54 milliards de DA. Les nationaux sont associés dans ce vaste chantier. En plus des projets étudiés par le Conseil national des investissements (CNI), présidé par le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, le ministère du Tourisme a donné son accord pour 550 projets au profit des nationaux pour une capacité d'accueil additionnelle de 50.000 places. Avec la création de 60.000 postes d'emploi, il s'agit d'hôtels de petits complexes ou encore au niveau du Sud. Nous nous intéressons aussi au tourisme thermal. A la fin du mois de février, nous avons délivré une dizaine de concessions pour des nationaux. Nous avons recensé plus de 200 sources thermales.10 d'envergure nationale, 40 de portée régionale. L'Etat a aussi un parc immobilier vieux qui a besoin de rénovation. Au mois de mars, le Conseil des participations de l'Etat a donné son accord pour la réhabilitation de ce patrimoine immobilier pour un montant de 46 milliards de DA. Nous avons également consacré 770 millions de Da pour la formation.

Les ressources humaines justement, c'est l'autre maillon faible du secteur. Nous avons beaucoup entendu parler de la carte de formation. Pouvez-vous nous parler de ce projet?
Effectivement, le secteur est en train de préparer la carte de formation qui prend en compte l'appareil actuel, avec les écoles de tourisme, d'Alger, de Boussaâda, de Tlemcen et celle de Aïn Témouchent qui est en cours de réalisation. L'objectif étant d'exploiter toutes nos capacités. Nous avons évalué nos besoins quantitativement et qualitativement, recensé tous les métiers en relation avec l'hôtellerie et à la gestion des infrastructures existantes et en cours de réalisation. Autrement dit, nous voulons adapter la formation aux besoins du secteur. En matière de formation, nos capacités pédagogiques sont limitées aussi. En plus des 136 structures de formation professionnelle il y a une quarantaine d'écoles privées liées au secteur. A cette démarche, seront associés les professionnels du secteur et des anciens stagiaires qui ont brillé par leur parcours. Cette carte sera discutée en réunion du gouvernement au mois de septembre.

Promouvoir le tourisme interne, une option qui revient en force ces derniers mois. Cela est-il lié à la conjoncture politique de la région qui a vu les algériens boycotter des destinations phares telles que la Tunisie ou encore l'Egypte? Ou cela répond-il à une vision pragmatique qui tend à convaincre les Algériens à rester dans le pays. Après avoir presque échoué à relancer la destination Algérie?
De prime abord, je tiens à rassurer qu'au ministère du Tourisme, nous n'avons pas de vision conjoncturelle. Notre stratégie dépasse les troubles dans la région.
Le 8 décembre (avant la Révolution des jasmins), et en marge du Salon international du tourisme, nous avons programmé une journée sur le tourisme domestique, une journée à laquelle ont assisté des experts aussi bien algériens qu'étrangers. Parmi les recommandations prises, il y a la diminution du flux des Algériens vers l'étranger. Et l'opportunité de miser sur le tourisme interne, parce que justement ce tourisme est indifférent aux conjonctures internationales. Nous ne sommes pas là, bien évidemment, en train de remettre en cause le droit des Algériens à passer leurs vacances à l'étranger, nous voulons juste insister sur le fait que l'Algérie est un beau pays qui dispose de sites merveilleux à découvrir et que beaucoup d'Algériens ignorent.

Avons-nous une carte des sites touristiques en Algérie?
Nous venons de lancer un recensement des sites touristiques en Algérie. Une enveloppe de 50 millions de DA est allouée à chaque wilaya avec comme objectif de définir les zones touristiques exploitables. A chaque région, sa spécificité. Nous voulons justement promouvoir les richesses et les potentialités de chaque région. Il y a par exemple le tourisme écologique, très peu fréquenté par les Algériens et pourtant le pays dispose de sites extraordinaires.
La particularité de ce tourisme est qu'il ne nécessite pas de grands investissements. Il y a comme je l'ai déjà cité, le tourisme thermal. Il y a le tourisme dans le Sud. En somme, nous voulons créer des pôles touristiques, proposer des circuits pour les touristes étrangers et algériens...

Cela doit se faire notamment avec la contribution des agences de voyages.
Ces dernières doivent se professionnaliser pour contribuer à la vente de produits touristiques. Il ne suffit pas d'être présent dans des salons pour promouvoir la destination Algérie. Il faut ouvrir d'autres perspectives avec l'intégration des TIC. Justement, dans le nouveau cahier des charges, nous faisons obligation aux agences d'utiliser les TIC dans leur processus avec l'engagement de l'Etat de les accompagner. Nous avons signé un accord avec le ministère des Postes et des Technologies de l'information et de la communication. Cet accord permettra entre autres, aux tourisites de faire des réservations et choisir des circuits via Internet.

Qu'en est-il du tourisme dans le Sud? Ne pensez-vous pas que les efforts consentis pour promouvoir cette destination s'ébrèchent face aux actes isolés d'enlèvements de touristes étrangers?
Je ne cesserai de dire et de répéter que le tourisme est l'affaire de tout le monde. J'insisterai là, sur le comportement des citoyens et sur l'implication de tous les secteurs. Ensemble on arrivera à faire de l'Algérie une destination de prédilection pour des millions d'étrangers. Nous nous référons au schéma directeur du secteur tracé pour l'horizon 2030. Un schéma qui s'articule autour des cinq principaux chapitres dont je citerai: la reconstruction de la destination Algérie; l'augmentation des capacités d'accueil à travers la promotion des investissements, l'amélioration des prestations de services, le financement, et l'encouragement du partenariat privé-public. Nous avons un pays riche en potentialités qui restent à l'état brut. Nous voulons les transformer en produits touristiques capables de drainer le plus grand nombre de touristes, mais pour cela on doit réunir toutes les conditions, à commencer par l'amélioration de la qualité des services.
Dans la perspective de la reconstruction de la destination Algérie, nous allons élaborer des guides qui seront offerts gratuitement aux voyageurs de la compagnie nationale Air Algérie, nous associerons aussi les représentations consulaires.

Chaque année, les pèlerins se plaignent de la mauvaise prise en charge dans les Lieux Saints et remettent en cause les engagements pris par les agences de voyages. Qu'avez-vous prévu cette année?
Il faut savoir que le ministère du Tourisme octroie les agréments pour les agences de voyages.
Mais lorsqu'il s'agit des Lieux Saints en plus de l'agrément, les agences sont soumises à un cahier des charges élaboré par le ministère des Affaires religieuses et l'Office du Hadj. Mon département intervient pour appliquer une sanction, comme la fermeture d'une agence de voyages, à titre d'exemple.
A retenir aussi que cette année, le gouvernement a pris les choses en main à temps. A mon avis, il ne faut pas incriminer toutes les agences. La majorité fait son travail correctement. Les défaillances sont l'oeuvre d'une minorité qui est sévèrement sanctionnée.

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