Hausse des prix, duperies, mauvaise qualité, rareté... de la piece détachée
Le mécanisme coince
Les coûts de la pièce détachée enregistrent des augmentations et des tendances historiques.

Les coûts de la pièce détachée enregistrent des augmentations et des tendances historiques en Algérie. Ainsi, le marché de la pièce détachée automobile est, une nouvelle fois, au devant de l'actualité nationale avec des rebonds douteux et des évolutions inquiétantes. Sur fond de pénuries, probablement imposées ou plus exactement fomentées par certains pontes et cercles du secteur, les usagers de ce secteur peinent à trouver leur salut. L'absence d'un système de régulation et de contrôle efficients et tangibles, à même de juguler les tentations des uns et des autres, se fait ressentir grandement dans ce secteur. Les usagers, quant à eux, sont laissés pour compte face à une horde de distributeurs et de revendeurs sans foi, ni loi. Autant le marché de la pièce détachée que celui de la maintenance et de la réparation automobiles ont connu des écarts historiques invraisemblables. Les solutions et les alternatives restent, pour le moment, absentes.
Des tendances historiques injustifiées
Les fameux cahiers des charges relatifs à la fabrication de pièces de rechange via les concessionnaires automobiles, censés recourir à la mise en place d'un tissu industriel de la sous-traitance nationale, ne semble pas aboutir pour le moment. Est-ce à dire qu'il faille réviser les mesures édictées et procéder à l'élaboration d'une nouvelle stratégie nationale inclusive en la matière? En tous cas, les opérateurs sont unanimes à considérer qu'il faut dépasser le stade des tergiversations et des hésitations pour concrétiser un projet national réaliste autour de cet axe à portée de main. Selon des experts algériens, le pays compte un parc automobile de plus de 6,5 millions de véhicules, auxquels s'ajoutent près de 160000 autres voitures importées par les 24 concessionnaires à fin 2019.
Les prix du marché courant ont connu une terrible hausse en l'espace d'une année seulement. Selon des calculs d'experts du secteur, les prix des pièces de rechange automobiles sont passés du simple au triple, voire davantage pour certaines marques automobiles, en l'espace de deux à trois années seulement.
De septembre de l'année 2023 à septembre de l'année en cours, les prix ont connu une hausse vertigineuse dépassant les 104,5% pour la plupart des pièces de rechange. Les exemples des pièces détachées dont les prix ont dépassé ce seuil sont multiples. On parle de pièces pour les systèmes de freinage, d'embrayage, de distribution, des amortisseurs... Simultanément avec ces hausses vertigineuses, les réparations mécaniques ont également été touchées par cette frénésie impitoyable. La main-d'oeuvre de la maintenance et réparation mécanique est passée du simple au double. Pour justifier cette situation insupportable, les acteurs du secteur usent de justificatifs liés aux hausses des prix à l'international, l'inflation mondiale et autre géopolitique des guerres dans nombre de régions de la planète. Mais en réalité, ces derniers sont dans la surenchère pure et simple, et les justificatifs exhibés restent irrecevables. Les usagers assistent médusés à cette flambée qui ne dit pas son nom, contraints qu'ils sont à mettre la main dans la poche pour pouvoir réparer leurs véhicules. «Je suis chauffeur de taxi. Je n'ai pas cru mes yeux quand je voulais changer mon kit d'embrayage. Il y a une année et demie, j'ai acheté mon kit à 7 500 DA. Je viens de le payer à plus de 18000 DA. C'est impressionnant. Pour les réparations, je les ai effectuées par dettes. Je n'ai pas quoi payer le mécanicien. Heureusement, que c'est un membre de la famille... Sinon, je serais au chômage.
Les usagers dindons de la farce
Ce n'est pas évident de persister dans cet état d'ambiance générale», note Saïd. «Ils ont arrêté les importations. Et sur le marché, il n'y a presque plus de pièces de rechange. Ce sont les anciens stocks qui circulent pour le moment. Même pour les pièces d'occasion, elles sont rares et aussi chères», s'exclame un commerçant de la pièce de rechange dans l'illustre quartier Jolie Vue, à Kouba. Là aussi, il est important de noter que nombre de marques circulent sur le marché à des variations de prix déconcertantes. Sans compter que des écarts impressionnants sont perceptibles chez nombre de détaillants de la pièce détachée pour une même et seule marque.
Avec tout ce que cela représente comme risques de tricheries, de plus en plus de personnes se rabattent sur les réseaux sociaux, dans l'espoir de tomber sur une perle rare ou une occasion d'or. Mais cela n'arrive que rarement. En effet, il est rare de tomber sur une personne honnête qui vous proposera un produit recyclé ou d'occasion fiable et bon marché. Pour ce qui est des réparations automobiles et tôlerie auto, des écarts incommensurables sont enregistrés entre les différents ateliers et garagistes. Les écarts sont impressionnants entre les régions du pays et, globalement, de zone en zone, dans une même wilaya. Tous les composants de la pièce détachée sont concernés par ces hausses vertigineuses, notamment les systèmes de freinage, d'embrayage, de distribution, des amortisseurs, etc. Les accessoires et autres équipements n'en sont pas exemptés.
Les acquis de l'émergence d'une chaîne de valeur...
Pourtant, l'émergence d'une chaîne de valeur de l'industrie des pièces détachées en Algérie aurait un impact positif certain sur nombre de domaines dont l'éclosion de filières complémentaires, l'augmentation de la plus-value du secteur, la création de postes d'emploi, la baisse graduelle des prix de la pièce sur le marché national, la création de start-up et floraison de la sous-traitance, etc.
Le pays gagnerait à relancer immédiatement ce dossier, moyennant des avantages et des incitations à la mesure des dividendes à récolter de ce domaine. L'inclusion des représentants des différentes filières concernées, ceux du patronat spécialisé et l'incitation des investissements directs étrangers pourraient stimuler ce secteur porteur de richesses et de plus-values avérées. Le secteur ainsi encouragé pourrait se tourner vers l'export de la pièce de rechange vers le continent et d'autres contrées, après satisfaction du marché local. Des perspectives inespérées pourraient émerger de ce secteur à forte valeur ajoutée.
L'urgence d'une étude de marché
Face à une telle anarchie dans ce secteur sensible, d'aucuns estiment qu'un contrôle rigoureux doit être imposé à hauteur des niveaux d'intervention dans le cheminement des pièces de rechange, à commencer par les circuits de l'achat et l'approvisionnement jusqu'à la distribution et la vente sur le marché national.
Les opérateurs et les différents acteurs dans cette chaîne d'intervenants doivent être clairement identifiés, et une base de données nationale succincte doit être dûment élaborée autour des équipementiers, sous-traitants, PME et start-up. Cela, sans compter la nomenclature des composants et pièces disponibles sur le marché afin d'éviter pareils flottements préjudiciables.
Aujourd'hui, le secteur de l'industrie doit impérativement disposer d'un outil performant de contrôle et de régulation, à travers la mise en place d'une autorité spécialisée dans l'analyse et le suivi de l'évolution du marché. Parallèlement, le secteur a besoin d'une étude de marché sérieuse et exhaustive qui doit être effectuée de manière urgente afin d'endiguer d'éventuelles complications dans le court terme et de
déceler les anomalies, les dysfonctionnements dans la chaîne de valeurs, etc.