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L'HISTORIEN MATHIEW CONNELLY LÈVE LE VOILE SUR LA QUESTION

Le combat algérien raconté par un Américain

L'auteur de «L'Arme secrète du FLN. Comment De Gaulle a perdu la Guerre d'Algérie», est un spécialiste de la Révolution algérienne.

Cinquante ans après l'indépendance de l'Algérie, la guerre diplomatique entre les nationalistes algériens et l'occupant français livre l'un de ses secrets les plus surprenants: la théorie du «choc des civilisations» et la notion de «lutte contre le djihad» trouveraient leurs origines dans des documents diplomatiques de la France coloniale. L'analyse fournie par l'historien américain, Mathiew Connelly à ce sujet, est formelle. «Ils (les Français) utilisent le terme de «djihad international» et même l'expression «guerre des civilisations» dans les documents diplomatiques» a-t-il affirmé lors d'un entretien paru dans le numéro «Hors-série» du journal Le Monde de février-mars 2012, sous le titre «La bataille d'Alger s'est jouée autant à Alger qu'à New York». L'auteur de «L'Arme secrète du FLN.
Comment De Gaulle a perdu la Guerre d'Algérie» - paru aux Etat-Unis en 2008, puis en France en 2011 - est un spécialiste de la Révolution algérienne. Il connaît, surtout, les péripéties du combat mené sans relâche par les représentants du FLN, à l'échelle internationale, contre la puissance française et son arsenal diplomatique.
L'explication du professeur Connelly est sans équivoque. Pour réduire à néant «L'Algérie française», les membres de la Délégation extérieure du FLN ont battu en brèche les concepts lancés par la propagande coloniale, menée en grande pompe au niveau des institutions internationales et auprès des grandes puissances. «Djihad international», «Guerre des civilisations», la propagande ne lésinait pas sur les expressions pour discréditer le combat pour l'indépendance de l'Algérie, selon l'historien.
Que de clichés brisés! D'avant-garde des communistes en Afrique du Nord, durant les années 1940, le combat des Algériens passe par la suite, à une incarnation du combat de «la Civilisation occidentale contre le Djihad». L'histoire bégaie. «C'est la même idée que celle de Samuel Huntington, le choc des civilisations, mais quarante ans auparavant», compare le prpfesseur Connelly.
C'est aussi la même que celle de «la hiérarchie des civilisations», prônée par l'actuel ministre français de l'Intérieur, Claude Guéant... cinquante ans après. Un demi-siècle s'est écoulé depuis la fin de la Révolution.
Et la question taraude à ce jour historiens et analystes: comment les nationalistes algériens ont pu faire basculer le conflit en leur faveur sur le plan diplomatique alors que les troupes de l'Armée de libération nationale (ALN) étaient à bout de souffle, voire même, décimées par l'armée coloniale autrement plus puissante et suréquipée? Sur ce point aussi, l'éclairage du professeur Connelly est édifiant. Il met l'accent sur la stratégie adoptée par les dirigeants du FLN pour tirer profit des tensions internationales liées à la guerre froide. «L'homme qui développe cette stratégie s'appelle Hocine Aït Ahmed (l'actuel président du Front des forces socialistes). Il écrit en 1948 un document d'une importance fondamentale où il décrit une stratégie pour la guerre en citant les grands stratèges du passé comme Carl von Clausewitz ou Ernst Jünge», précise le professeur d'histoire à l'université Columbia, à New York. Il raconte, ensuite, comment l'idée de l'internationalisation du conflit algérien a fait son chemin au sein du mouvement nationaliste.
«Il (Aït Ahmed, Ndlr) explique que mener le combat contre la France sur les champs de bataille n'aboutira jamais à cause de la trop grande différence entre les forces militaires», souligne-t-il.
L'historien américain suit pas à pas, le parcours des dirigeants FLN pour obtenir le soutien international à la question algérienne. Il établit une chronologie détaillée des victoires remportées par la diplomatie algérienne naissante. Le chemin fut long et sinueux.
En 1953, la délégation algérienne est présente à la conférence des partis socialistes asiatiques à Rangoun (Birmanie). Première victoire: la conférence se solde par la résolution de défendre la cause anticoloniale. Deux ans après, à la conférence de Bandoeng (Indonésie), «il est décidé de coordoner l'action des nationalistes algériens, marocains et tunisiens».
La question algérienne avance à grands pas. Les représentants du FLN s'engouffrent dans la brèche de la guerre froide, ouverte entre les Etats Unis et l'Union soviétique. Ils jouent sur l'inquiétude des USA de voir l'Urss mettre la main sur l'Afrique du Nord. «Aït Ahmed était persuadé que les Américains ne laisseraient jamais les Soviétiques prendre pied en Afrique du Nord. Il avait compris que les nationalistes nord-africians, pas seulement les Algériens, mais aussi les Marocains et les Tunisiens pouvaient utiliser l'allié américain de la France en agitant la menace de voir l'Afrique du Nord tomber dans les bras du communisme», explique le professeur Connelly.
Stratégie payante. «En 1956, il (Aït Ahmed) ouvre le bureau du Front national de libération (FLN) à New York».
Au niveau de l'ONU, la lutte diplomatique s'intensifie jusqu'à l'inscription de la question algérienne à l'ordre du jour de son assemblée générale, le 20 septembre 1957. L'ONU reconnaît à l'Algérie le droit à l'autodétermination, le 20 décembre 1960. Rappelé à la rescousse de l'empire colonial, le général De Gaulle se rend à l'évidence: l'indépendance de l'Algérie est inéluctable.
Arrive, enfin, le 18 mars 1962 où les Accords d'Evian furent signés entre la délégation algérienne, menée par Krim Belkacem, ministre des Affaires étrangères du Gouvernement provisoire et le chef de la diplomatie française, Louis Joxe.
Le cessez-le-feu fut programmé pour le lendemain à midi. mettant fin à «La nuit coloniale». Une nuit qui cache énormément de secrets...

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