Un film sera consacré à la vie et à l’œuvre de l’Emir Abdelkader
L’épopée d’un grand homme
La vie de l’Émir, c’était aussi les grands espaces, l’errance dans une Algérie qu’il a fondée à la force du glaive.
Personnalité hautement historique et de dimension internationale, l'Émir Abdelkader ne mérite-t-il pas une oeuvre cinématographique à l'image de sa stature? La réponse est «oui» pour n'importe quel Algérien. Le président de la République complète cette réponse en y ajoutant sa conviction que pareille entreprise ne doit pas relever d'une réalisation anodine. Et pour cause, le chef de l'État entend «conférer à cette oeuvre une dimension universelle, vu la haute symbolique que représente l'Émir Abdelkader». Le président Tebboune connaît parfaitement la vie et l'oeuvre du fondateur de l'État algérien moderne. Il sait aussi l'empreinte qu'il a laissée dans un XIXe siècle troublé par des guerres coloniales et les prédations d'un Occident orgueilleux. Dans cette ambiance belliqueuse, l'Émir aura été un rayon de sagesse et une âme acquise à la modernité, malgré des circonstances historiques à contre-courant de sa pensée qui séduisait jusqu'à ses pires ennemis. Le président Tebboune, qui doit certainement imaginer une oeuvre cinématographique immense, compte tenu du parcours de l'Émir «dans l'édification de l'Algérie contemporaine et son rayonnement international». Car l'Émir est l'un des premiers Algériens, si ce n'est le premier, à avoir fait montre d'un universalisme et d'un humanisme, avant même que ses concepts ne soient évoqués dans les universités occidentales. C'est l'Émir algérien qui a déployé «tous ses efforts consentis pour la protection des minorités à travers le monde», fait remarquer à juste titre le président de la République.
La vie et l'oeuvre de l'Émir Abdelkader, dont l'écho a traversé l'Atlantique, sont une grande épopée qui ne peuvent se raconter de manière anodine. L'homme a résisté 17 ans, les armes à la main. Il a tenu tête à la plus puissante armée du XIXe siècle. Il s'est battu en leader aimé et apprécié de ses hommes, sans rien perdre de son humanité. Toutes les batailles qu'il a remportées et celles qu'il a perdues ont forgé sa conviction de la nécessité d'une réflexion profonde sur son époque, sur les règles du combat et le traitement des prisonniers. Et plus encore, le philosophe qu'était l'Émir n'a, à aucun moment, cédé face au guerrier, au stratège militaire qui savait donner l'envie de se battre à ses hommes.
La vie de l'Émir, c'était aussi les grands espaces, l'errance dans une Algérie qu'il a fondée à la force du glaive, mais aussi par les amitiés qu'il a nouées à Constantine, Béjaïa, Médéa et d'innombrables autres villes. L'homme a façonné l'identité algérienne. Toutes les générations qui ont suivi son noble combat l'ont cultivée. Et si aujourd'hui l'algérianité transcende tous les clivages tribaux, c'est aussi parce que l'Émir Abdelkader a trouvé les mots pour le dire aux chefs de tribus de son époque.
La vie de l'Émir, c'est aussi la douleur immense d'un exil imposé, d'un traitement inhumain au château d'Amboise en France où il a enterré tant et tant de fidèles. Une souffrance qu'on ose à peine imaginer, mais que le fondateur de l'État algérien moderne a subie dans sa chair et son âme, avec sa noblesse et sa grande sagesse. Et ce sont ces traits de personnalité d'authentiques grands hommes qui ont mis l'Émir sur la voie de la paix, quelle que soit l'origine des personnes persécutées. Son action à Damas, qui a sauvé la vie de milliers de chrétiens, n'a pas d'équivalent en ce XXIe siècle. Quel est le dirigeant de notre époque qui peut avoir le courage d'agir comme l'a fait l'Émir Abdelkader? Les rois du monde chrétien y ont vu un «ange» dans le corps d'un homme.
Le chef de l'État, au même titre que tous les Algériens, apprécie l'homme à sa juste valeur. Il lui revient la mission de le révéler au monde. Il mesure l'importance de cette responsabilité historique et admet sans doute que l'art peut se mettre au service de l'Histoire. Cela a déjà été le cas à maintes reprises. Le cinéma a permis à l'humanité de découvrir des hommes et des femmes qui ont marqué leurs époques en bien ou en mal. C'est au cinéma de dire à l'humanité ce que vaut l'Émir Abdelkader pour son pays, pour nombre de grands dirigeants parmi ses contemporains et pour la politique, l'humanisme et la sagesse, dont plus d'un siècle après son décès, on ne trouve pas encore l'équivalent. Mais l'art cinématographique, c'est aussi de la technique, de la technologie, en plus de l'écriture. Le président de la République, qui a ordonné d'ouvrir «la voie aux compétences cinématographiques algériennes et mondiales, en tenant compte du contenu convenu dans le cahier des charges», est appelé à veiller à ce que le film sur l'Émir Abdelkader bénéficie des plus récentes techniques pour faire ressortir au mieux sa vie et son oeuvre. Et, franchement, il n'y a pas lieu de regarder à la dépense. Le monde doit savoir l'exceptionnelle contribution de l'Algérie à travers cet immense personnage qui a fondé ce grand pays.