Comment gérer les embellies
Le président Tebboune a pris des décisions que l’on qualifie aujourd’hui de salutaires.
Le Fonds de régulation des recettes (FRR), alimenté par les excédents de la fiscalité pétrolière, est la digue mise en place par le législateur algérien pour éviter une descente aux enfers comparable à celle que le pays avait vécue après le choc pétrolier de 1986. Beaucoup de citoyens se souviennent de cette époque très difficile. La chute des prix de l'or noir avait coïncidé avec une dette extérieure colossale qui a obligé le pays, quelques années plus tard, à subir un plan d'ajustement structurel imposé par le FMI.
Ledit plan signifiait des coupes budgétaires, des fermetures d'entreprises publiques, des réductions des subventions, une dévaluation de la monnaie nationale... bref, une grande partie de la population sombrait dans une extrême pauvreté, avec un chômage à plus de 30% et une inflation supérieure à 50%. Survivre en Algérie relevait du miracle, notamment en raison du déchaînement terroriste et l'isolement diplomatique du pays. La cause de cette déchéance sociale et économique tenait à une absence de prévision financière. Totalement dépendant des recettes en hydrocarbures pour ses exportations, le pays s'est laissé séduire par une embellie de l'or noir, consécutive à la première guerre du Golfe opposant l'Iran à l'Irak. Les autorités de l'époque avaient visiblement sous-estimé la gravité d'une démarche financière tournée vers l'endettement. Pour preuve, le pays a chèrement payé une dérive, dont la société ressent, jusqu'à ce jour les stigmates. En effet, la décennie noire est, en partie, l'une des conséquences d'une politique économique et financière, pour le moins, imprudente.
Et c'est parce qu'il mesure le caractère éminemment dangereux d'une démarche aventuriste que le président Tebboune a pris des décisions que l'on qualifie, aujourd'hui, de salutaires. Arrivé à la tête de l'État dans des circonstances économiques difficiles, avec un appareil économique grippé par des mois de quasi-vacance du pouvoir et des cours du pétrole en dessous des 50 dollars le baril, le chef de l'État a commencé par mettre un point final aux importations anarchiques. À bien suivre le déroulement des évènements depuis sa décision de réduire de moitié le budget consacré aux importations, l'on déduit que l'homme entendait éviter au pays une autre plongée dans les abysses de l'endettement. D'autant plus, qu'à l'époque aussi, on voyait venir la crise politique. Un scénario qui ressemblait sur certains de ses aspects à la première grande crise financière du pays.
Cela dit, il faut souligner que les autorités ont tout de même retenu la première leçon, en procédant dans la première décennie du XXIe siècle au remboursement de toute la dette extérieure. Et l'embellie pétrolière consécutive à la seconde guerre du Golfe, qui a vu l'Irak envahi par l'Otan, l'Algérie a fait montre de sagesse en créant le Fonds de régulation des recettes. C'est ce fonds qui a permis au pays de tenir plusieurs années, malgré une chute brutale et durable des prix de l'or noir, à partir de 2014. En mars 2020, la pandémie de Covid-19 devait mettre l'économie nationale à genoux, comme ce fut le cas pour beaucoup de nations. En ce temps le FRR était clôturé, car vide. La fiscalité pétrolière ne parvenait même pas à boucler une partie du budget. On imaginait déjà la deuxième descente aux enfers. Mais le président Tebboune avait son plan. L'argent de la République a été redistribué autrement.
Il a pris des décisions historiques en augmentant les petits salaires, en soutenant les petits métiers, tout en veillant aux équilibres financiers du pays. Avec la nouvelle embellie du pétrole intervenue en même temps que la guerre en Ukraine, le FRR a été rouvert et les excédents commerciaux n'étaient plus du seul fait des hydrocarbures, mais également d'exportations hors hydrocarbures. Cependant, à la différence des deux précédents épisodes de faste, l'argent n'a pas été dépensé dans les importations, mais investi dans de grands projets économiques. Aujourd'hui, la caisse est bien alimentée et toutes les leçons retenues. Le Fonds de régulation des recettes (FRR)Les abysses de l'endettement en Algérie