L'Expression

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Il nous a quittés en novembre 2016

Amar Ezzahi, le génie du Chaâbi

Il a été l’artiste qui s’est le moins confié aux médias, pour ne pas dire jamais. il a été aussi un chanteur qui ne s’est guère produit dans des concerts officiels et ses productions en salles se comptent sur les doigts d’une seule main.

Pourtant, il est le meilleur chanteur chaâbi pour une bonne partie des amoureux de ce style. Amar Ezzahi nous a quittés le 30 novembre 2016. C'était dans les soirées des fêtes de mariages et de circoncisions que ses fans l'attendaient le plus souvent afin de s'abreuver de sa voix et de sa façon unique d'interpréter les meilleurs morceaux du chaâbi avec sa touche exceptionnelle. Son point fort a été indéniablement l'improvisation et l'innovation. Il était l'un des rares chanteurs chaâbis qui pouvait «détourner»» les musiques des chansons. Il pouvait ainsi allègrement et avec une aisance incroyable interpréter la mythique El Harraz sur le fond musical de Youm El Dejemaâ et vice versa. Il était aussi capable d'interpréter magistralement la célèbre «Ana El Kaoui» en s'y appuyant sur une infinité de musiques toutes différentes les unes des autres! Un exploit que lui seul savait réalisé et dont il était l'unique détenteur du secret. On peut de ce fait écouter inlassablement et interminablement Amar Ezzahi sans jamais se lasser bien qu'il s'agisse très souvent des mêmes textes et des mêmes kacidate.

Un cheikh unique et incomparable
L'enjeu, tout l'enjeu, réside dans l'interprétation et l'improvisation. Des témoins ayant assisté à deux soirées animées par Amar Ezzahi dans la même semaine ont affirmé qu'aucune ne ressemblait à l'autre et ce, bien qu'il s'agisse du même répertoire interprété. Ezzahi savait toujours surprendre ses auditeurs au beau milieu d'un istikhbar et à chaque détour d'une kacida. Les musiciens d'Amar Ezzahi, bien qu'extrêmement doués et expérimentés, ont été souvent pris de court par le Cheikh, car ce dernier était imprévisible là où l'on pouvait s'y attendre le moins. Amar Ezzahi était en mesure de passer d'un air musical à un autre à tout moment, ce qui exigeait de ses accompagnateurs de faire preuve d'une grande habileté et d'être prêt à tout moment. Et même quand les musiciens perdaient le fil, Amar Ezzahi avait toujours la technique de sauvetage adéquate pour les faire rabattre sur les rails. Et c'est à ce niveau aussi que résidait tout le génie d'Amar Ezzahi. La spontanéité était également l'une de ses forces. Il lui arrivait, parfois plusieurs fois en une soirée, d'oublier pour un moment un passage d'un texte chanté, Amar Ezzahi répétait alors sans se gêner plusieurs fois le même mot tout en cherchant la suite, avec un naturel déconcertant.

Spontanéité et naturel
C'était également l'un de ses charmes quand il chantait. Le public, quand Ezzahi butait sur ce genre de situation, l'encourageait en laçant acclamations et youyous interminablement. Amar Ezzahi est vite revigoré et repartait de plus belle. Ainsi, ce qui peut constituer une faille chez un autre artiste constitue une force voire un délice dans le cas d'Amar Ezzahi. Ce dernier a révolutionné le chaâbi en l'ouvrant sur d'autres genres musicaux qui pouvaient pourtant paraître inconciliables avant qu'il ne tente l'expérience. Avec Amar Ezzahi, on pouvait se retrouver subitement face à un long passage de musique classique, ou encore à toute une version d'une qacida teintée de flamenco, de musique espagnole, française, etc. Il existe d'ailleurs une célèbre version d'El meknassia interprétée par Amar Ezzahi sur le mode flamenco. De quoi dérouter tout grand musicien! Amar Ezzahi a même été sévèrement critiqué par les puristes du chaâbi qui lui ont reproché ses largesses et les libertés qu'il prenait en chantant. Mais lui savait que la musique est sans frontière. C'est un mode d'expression universel et il s'en est très tôt rendu compte. Jusqu'aux dernières années de sa vie, à plus de 70 ans, il a continué d'animer des soirées succulentes et d'une beauté exquise dans les fêtes familiales. Et jusqu'à l'ultime soirée, il n'a pas cessé d'innover et d'improviser. Il suffit, par exemple, de cliquer sur Youtube Amar Ezzahi, Beni Messous, 2014, pour s'en rendre compte. C'était deux années avant son décès. Il avait 73 ans. Quel génie!

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