Une crise française
La crise qui se déroule en France, depuis des mois et, plus exactement, depuis la dissolution de l'Assemblée nationale par le président Emmanuel Macron, au lendemain de législatives aussi anticipées que catastrophiques, ne relève pas des épisodes fortuits. Elle est le syndrome d'un système politique à bout de souffle, après près de 60 ans de secousses et de rebondissements incertains. Pour son second mandat, Macron a eu des échappatoires, notamment les Jeux olympiques d'été et l'inauguration de Notre Dame rénovée, mais pour le peuple de France, il n'y avait là rien d'enchanteur, tant les conditions de vie et de travail se sont dégradées à une vitesse alarmante. À la source de cette dégradation interne et extérieure, une crise politique qui a atteint son paroxysme, avec un gouvernement sitôt composé sitôt contesté, du fait des résultats des législatives qui ont posé trois groupes parlementaires, l'un de la Gauche unie, sous la bannière d'un Nouveau Front Populaire (NFP), l'autre au profit de l'extrême droite incarnée par le Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen et un troisième regroupant, pêle-mêle, les Macroniens du parti Renaissance et la droite de la formation Les Républicains. Aucun de ces groupes ne détient la majorité nécessaire pour sortir de l'ornière actuelle. Ainsi, la France est-elle confrontée, pour faire simple, à un bras de fer entre le NFP et une coalition hétéroclite allant de la droite extrême à l'extrême droite, pendant que le président Macron joue sa partition singulière. Point culminant de cette crise inédite, le vote d'une motion de censure, le 4 décembre, par une large majorité de députés qui ont mis fin à une courte existence du gouvernement Barnier pendant que l'opinion unanime accuse Macron d'être le principal responsable du fiasco. Du jamais- vu depuis 1962, dans une Vème République dont la Constitution exclut, aujourd'hui, le recours à de nouvelles législatives anticipées. En conséquence, le pays est dos au mur, d'autant qu'à la crise politique se conjugue une crise économique également phénoménale, la dette extérieure ayant atteint des cimes vertigineuses (3 228 milliards d'euros, soit 112% du PIB), au point que Paris doit débourser 30 milliards d'euros par an uniquement pour les intérêts! Les grandes et belles promesses du candidat Macron qui assurait vouloir réformer le système dans son ensemble, impulser l'économie pour la rendre plus compétitive et, surtout, inventer une nouvelle stratégie politique loin du clivage gauche-droite sont parties en fumée et la France aborde 2025 sans gouvernement assuré et sans budget. Droit dans ses bottes, en apparence, le chef de l'État est néanmoins face à la ruine de ses ambitions politiques et économiques. Les Françaises et les Français, quant à eux, doivent, désormais, prendre en compte un état des lieux de plus en plus alarmant.