Légitime ambition de puissance
Se positionner à équidistance des deux pôles d'influence que sont le G7 et les Brics représente un acte stratégique dans la politique extérieure algérienne. Dans un contexte mondial en mutation, où les équilibres économiques et géopolitiques sont bouleversés, l'Algérie a véritablement l'opportunité de diversifier ses partenariats et renforcer sa position sur la scène internationale, en tant que nation indépendante et tout à fait souveraine dans ses décisions. La nouvelle donne géopolitique induite par la guerre en Ukraine propulse l'Algérie sur le devant de la scène méditerranéenne et en fait un partenaire stratégique pour l'Union européenne.
Cette nouvelle réalité géopolitique régionale oblige les pays européens à dépendre de l'Algérie pour ses apports énergétiques. Que ce soit le gaz naturel, l'électricité solaire ou encore l'hydrogène, l'Algérie est en train de s'imposer comme une source d'approvisionnement majeur d'un pôle de puissance, de croissance et de technologie incontournable dans le processus d'émergence qu'elle négocie, ces dernières années. L'Europe n'est, certes plus ce qu'elle était, mais elle demeure un partenaire intéressant pour une Algérie qui aspire à des transferts de savoir-faire et ne se gêne pas de le réclamer. Elle en a les moyens et la volonté. Et compte tenu des rapports de forces du moment, l'UE est bien obligée de parlementer.
L'ère de l'orgueil mal placé est révolu. La renégociation de l'accord d'association réclamée et obtenue par Alger, témoigne des nouvelles relations entre l'Algérie et l'Europe. En même temps que de marquer sa nouvelle ambition régionale face aux Européens, l'Algérie construit avec ses voisins du Maghreb, une nouvelle organisation régionale, susceptible de réussir là où l'Union du Maghreb arabe a échoué. Il n'est pas dit que l'édification de cet ensemble maghrébin puisse développer une influence dans les mois qui viennent, mais il est entendu qu'à voir la cartographie politique, économique, démographique et géographique, on est forcé de s'attendre à l'émergence dans les prochaines décennies d'un nouveau pôle de croissance en Afrique du Nord. Car, il faut bien se le dire, le Maghreb n'est qu'une étape, puisque la démarche algérienne peut séduire en Égypte, un véritable géant nord- africain avec sa centaine de millions d'âmes et ses 404 milliards de PIB. Il ne s'agit pas de rêver les yeux ouverts, mais de faire montre d'une légitime ambition de puissance pour cette Afrique du Nord. Et ce ne sera pas une «folie», puisque cette région du monde a vu naître de grandes civilisations...