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Abdelkader Djeriou à L’Expression

«La culture n’est pas une priorité pour l’état»

Que ce soit à la télé, sur les planches ou au cinéma, Abdelkader Djeriou brille et ne laisse personne indifférent. Aujourd'hui, il revient dans une nouvelle production qui est visible sur la plateforme VOD
«Yara». Le nom du feuilleton? «Babour Ellouh», qui a déjà fait le buzz avant que son tournage ne s'arrête d'un coup...
Il est réalisé par le Tunisien Nasreddine Shili, celui qui a assuré la réalisation du drama à succès «Ouled Lehlal» en 2019. «Babor Ellouh» est produit par Imed Hanouda (Wellcom advertising), d'après un scénario d'Abdelkader Djeriou et de Faten Chadli. Un feuilleton qui revient en force cette année après avoir trouvé un nouveau moyen révolutionnaire de diffusion. Une première en Algérie. Dans cet entretien, Djeriou revient sur ce dernier travail, tout en nous faisant part de son sentiment quant à la situation culturelle en général et de la télévision et du théâtre en particulier...

 

L'Expression: Un mot sur le feuilleton Babor Ellouh dans lequel vous campez le rôle principal?
Abdelkader Djeriou: Babor Ellouh c'est une nouvelle expérience artistique. C'est presque une continuité dans le style de Ouled Lehlal car ça a super bien marché, pour nous, le travail dans l'indergroud. Cette fois, on a essayé de mettre la lumière sur un phénomène qui s'est propagé dans la société, à savoir la harga. Ce n'était pas évident au départ car c'est un thème hypersensible. On a osé le faire. On s'est basé dans l'écriture du scenario sur de nombreux témoignages de vrais harraga. Aussi, la harga c'est juste un axe dans le feuilleton. Babor Ellouh parle en général de l'injustice. On parle aussi des mariages des mineurs, du racisme... Il y a une communauté noire en Algérie qui possède une excellente musique, le «diwan» qui n'est pas exploité ni au cinéma ni dans nos séries télévisuelles. Je le dit toujours, pourquoi avons-nous honte de notre culture? On voit souvent de la musique turque, de la musique internationale, mais on ne voit pas de musique locale.. On a essayé de travailler sur cela avec la scénariste Faten Shadli et le réalisateur Nasreddine Shili. Je précise que Babor Ellouh n'est pas là pour donner des leçons ou apporter des solutions. Notre rôle est d'exposer une situation, raconter une histoire et surtout transmettre une émotion...

Les gens qui ne connaissent pas l'application Yara ont cru que le feuilleton ne passera pas à la télé car il a été censuré. Que répondez-vous à ça?
Non, pas du tout. Nous l'avons affirmé sur nos vidéos que Babor Ellouh sera sur la plateforme Yara. C'est pour cela qu'on a fait la série «confinement», aussi pour promouvoir l'application Yara. Que le feuilleton ait été censuré ou interdit à la télé, cette info est complètement fausse. Ce sont juste des rumeurs. Ce n'est pas le cas. On a choisi dés le départ l'application.

Pourquoi avoir choisi quasiment le même casting que Ouled Lehlal?
Il y a seulement trois ou quatre comédiens qui sont de Ouled Lehlal. Tarek Bouarara, Samia Meziane, Nasser Soudani, Yasmine Amari pour ne citer que ceux-là, ils n'avaient pas participé à Oueld Lehlal. Au contraire, il y a peut-être 20% du casting de Ouled Lehal. On s'est basé sur de nouvelles têtes.

Le feuilleton Ouled Lehlal s'est terminé en queue de poisson. On parlait d'une seconde saison. Mais il n'y a pas eu de suite au final. Que s'est-il passé?
C' ‘était une fin ouverte. On était obligé d'enlever plusieurs séquences et finir à temps car nous avions tourné pendant le mois de Ramadhan. C'est ça le problème, ne pas pouvoir débloquer les budgets bien avant. Cela fait partie des contraintes qui se sont imposées à nous. On se retrouve à tourner à la dernière minute. Donc les meilleurs comédiens sont déjà pris, idem pour les meilleurs techniciens. Heureusement que la série a bien marché. Mais ce n'était pas évident pour nous de tourner à l'extérieur. On a opté tout de même pour une fin qui est pratiquement ouverte et qui laisse une porte pour une deuxième saison. Si j'avais tourné la dixième saison, Merzak aurait collé à ma peau durant toute ma vie. Je voulais le lancer dans un autre chalenge, camper un autre personnage qui est Hasni. Peut-être qu'après Babor Ellouh, il y aura la suite de Ouled Lehlal.

Comment avez-vous travaillé en raison de la situation sanitaire qui prévaut dans le pays?
Ce n'était pas évident du tout. On a essayé de respecter les consignes. Mais avec le climat de la pandémie, ce n'est pas évident. Le climat ça joue sur le moral des comédiens, sur l'atmosphère générale. Ça a mis beaucoup de stress et de pression. Mais on a essayé de s'adapter à la situation et on a réussi à le terminer. J'espère que le public appréciera.

Que pensez-vous des productions télévisuelles de cette année?
Ce n'est pas pour juger, mais je trouve qu'il y a plusieurs productions, ce qui est une bonne chose. On peut regarder et apprécier de nombreuses oeuvres. ça profite au téléspectateur algérien. On a vu plusieurs expériences de plusieurs styles, que ce soit dans la comédie ou le style dramatique. Si l'on regarde le feuilleton Lyam qui passe sur l'Entev, pour moi, c'est le meilleur feuilleton dans l'histoire de l' Entv. Il y a un bon début pour le style «drama» en Algérie, et notamment dans sa diversité. J'espère que cela va marcher. Moi je reste optimiste car c'est le principe du verre à moitié vide, à moitié rempli. J'essaye de voir la partie pleine. ca donne l'opportunité à plusieurs acteurs de briller. On a vu de nouvelles têtes, notamment dans le feuilleton Bnet Lebled. Au final, c'est un métier compétitif.

C'est dommage que l'on ne voit nos produits algériens que durant le mois de Ramadhan..
Parce qu'il n'y a pas de budget le reste de l'année. L' application «Yara» va donner cette opportunité là. Si on arrive à rentabiliser un produit avec la billetterie cela veut dire qu'on peut produire. Comme partout dans le monde, on regarde combien tel acteur parvient- il à faire des entrées. Bien que je ne crois pas au star-système, car je me considère comme un prolétaire de la culture, mais c'est comme cela qu'on pourra créer un marché.

Que pensez-vous de la situation actuelle de la culture en Algérie?
Ce n'est pas une priorité pour l'Etat. Je pense que ça fait longtemps déjà, que ça n'a jamais été le cas pour l'Algérie. Je déteste le principe de l'artiste mesquin qui serait un demandeur de logement. Je considère qu'être artiste est un métier comme un autre. Il faut juste nous créer le marché et nous laisser faire notre travail tout en préservant notre contact direct avec notre public. Créer des salles de cinéma, laisser de telles applications exister, créer des cahiers des charges pour les chaînes de télé. Cela fait presque dix ans quand même qu'elles existent! Il faut créer des salles de cinéma, des réseaux de distribution, là je retournerai peut-être au cinéma et je quitterai la télé.. On n'a pas inventé le fil à couper le beurre. Ce sont des lois qui doivent être mises en place.

Croyez-vous à l'investissement du privé dans le secteur culturel?
Le privé quand il verra qu'il y a un intérêt, il va suivre, mais pour ce faire, il faut justement créer ce marché. Il pourra mettre de l'argent par la suite dans un film par exemple pour pouvoir le rentabiliser. Si tu crées ce marché, l'investisseur viendra automatiquement et là, on parlera d'un écosystème. Exemple, moi je réalise un produit et l'autre va le commercialiser; c'est ce qui se passe avec Oreedoo. Ils vont vendre un produit. C'est ça l'idée d'un marché, payer pour voir un produit audiovisuel ou cinématographique.

Et que pensez-vous enfin de l'état du 4ème art en Algérie, vous qui avez été appelé justement dans le cadre d'un comité spécifique dans ce registre?
Personnellement, j'ai été sollicité pour établir une réflexion. Le théâtre dépend de la volonté de l'Etat. J'ai eu un énorme conflit avec Azzedine Mihoubi quand il était ministre, quant il parlait du théâtre privé. Ce dernier c'est au privé de le créer. Le théâtre de l'Etat a une fonction publique. Cela veut dire qu'il faut monter les grands spectacles et faire des «convections». Il n'y a aucun théâtre d'Etat au monde qui est rentable. Il n'y a que le théâtre commercial qui est rentable parce qu'on ramène des têtes d'affiches, on fait des comédies etc. La Comédie française n'est pas entable. Mais elle montre Molière pour préserver la culture française. Notre rôle en tant que théâtre est de préserver le répertoire pour toucher un large public comme faisaient nos ancêtres jadis. À côté de cela, il faut une troupe permanente dans chaque théâtre; Alloula avait sa troupe, tout comme Kaki, Kateb Yacine, Bachtarzi... Ils ne veulent pas recruter des comédiens. Or, on ne peut pas faire une expérience théâtrale sans une équipe permanente de comédiens. J'espère que ca va aboutir à quelque chose. Le théâtre d'Etat est un droit constitutionnel. L'Algérien a le droit de voir du théâtre mexicain, chinois etc. et aussi il doit voir nos grands auteurs sur les planches. Ceci relève de la fonction publique qui n'est pas forcément rentable.

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