La romancière Lynda Koudache
Écrire en Tamazight ou le défi d’une femme
En écrivant son premier roman en langue amazighe, Lynda Koudache avait relevé un véritable défi, et non des moindres. Avant elle, aucune femme n'avait encore écrit de roman en tamazight. Il y avait certes des poétesses, et elles étaient fort nombreuses, qui avaient choisi la langue amazight pour s'exprimer en vers, mais au registre du roman, elle a été la première à s'y aventurer. Car il s'agissait bel et bien d'une aventure. Quand elle publie son premier roman intitulé«Aâchiw n tmes, en 2009, la situation de l'édition du livre d'expression amazighe était loin d'avoir le même éclat qu'aujourd'hui. La littérature amazighe en était encore à ses balbutiements. Lynda Koudache aurait pu continuer d'écrire en langue françaises, son tout premier livre avait été rédigé dans cette langue. Mais l'appel du coeur y était pressant et elle n'a pas hésité à relever un défi qui le demeure à ce jour. Car écrire en langue tamazight reste toujours une entreprise ardue; la langue amazighe demeure encore au stade expérimental dans tous les domaines. Lynda Koudache n'est pas passée directement au roman quand elle a décidé de tremper sa plume dans la langue de ses ancêtres. Elle a en effet publié «Lligh uqbel ad iligh», un recueil de poésie en tamazight en 2005 puis la nouvelle intitulée «Anagi n tudert» en 2006. Après quoi, Lynda Koudache a compris que la meilleure façon pour une femme sensible et douée comme elle, de s'exprimer, ne peut être que le roman. De même qu'elle a mesuré l'apport que pouvait avoir la sortie d'un roman à une période décisive du processus de réhabilitation de la langue amazighe. Elle met donc quelques années à écrire Aâchiw n tmes, premier roman, écrit par une femme en langue amazighe. Le roman est vite épuisé et n'a jamais fait l'objet d'une réédition. Car Lynda Koudache s'est vite mise à l'écriture d'un second roman qui allait lui prendre tout son temps et toute son énergie. Un roman volumineux, profond et dense qui allait paraitre après un très long labeur. Lynda Koudache passait de longues heures pendant plusieurs mois à le penser, à l'écrire et à le peaufiner. Le roman de Lynda Koudache, paru en 2016 et intitulé Tamacahut taneggar, a reçu le grand prix Assia Djebar du roman en langue amazighe en 2016. Née en 1975 à Mécheria, Lynda Koudache est issue d'une famille kabylophone originaire de Ouacif dans la wilaya de Tizi Ouzou. Elle a vécu longtemps à Fréha près d'Azazga. Depuis son adolescence, elle était très portée sur la littérature et plus particulièrement sur l'écriture et la poésie. Ses premiers textes poétiques en langue française ont paru dans le Cahier littéraire des éditions du Petit Pavé. Elle continue d'écrire et de se faire publier dans diverses publications collectives comme l'ouvrage de poésie intitulé Comme une forêt de mots dits. En 2003, elle publie enfin son premier livre. Un recueil de poésie en langue française, intitulé L'Aube vierge. En 2005, elle sort un autre recueil de poésie en langue amazighe qui rend hommage aux femmes: Lligh uqbel ad Iligh (J'existais avant d'exister). Sa nouvelle intitulée Anagi n tudert (Témoin de la vie) a été publiée dans un ouvrage collectif en France. Cette nouvelle obtint le Prix d'encouragement international du forum des femmes de Méditerranée-France. Lynda Koudache a défriché le terrain de l'écriture romanesque en langue amazighe. Par la suite, des dizaines d'autres femmes écrivaines ont publié des romans en langue amazight. Son mérite est grand. Elle est la digne héritière de Fadhma Ath Mansour et de Assia Djebar.