Cherif Kheddam 1927-2012/Ses œuvres...
Des créations audacieuses
L’amour de Cherif Kheddam pour l’Algérie s’est exprimé de toutes les manières, mais surtout par ce qu’il a donné à la musique algérienne. Sa rectitude d’esprit, sa probité de l’art, la conscience du devoir, le souci de la tâche et du style jusque dans le détail, voilà le vrai Chérif Kheddam.

Par Youcef DRIS
Véritable monument de la culture algérienne d’expression kabyle, Chérif Kheddam était un artiste avec une grande ambition, mais non pas tant celle de l’argent et des honneurs que celle de la probité artistique. Humilité d’homme au grand talent, fierté de créateur artistique, lorsque certains chantres prétendaient que son style était teinté de monotonie, Chérif Kheddam en seigneur leur répondait: «Si vous pensez que je ne possède pas de variété dans les idées, c’est évidemment qu’il me manque peut-être votre génie, et c’est pour ça que toute ma vie, je consacre tout mon effort, toute ma peine, tout mon amour brûlant à tout un art pour lequel Dieu n’aurait pas mis la vraie vocation en mon âme». C’était là, le vrai artiste dans toute son humilité. Treize années déjà se sont écoulées depuis la disparition de l’artiste auteur-compositeur-interprète kabyle, décédé le 23 janvier 2012, à Paris, des suites d’une longue maladie. L’auteur de la célèbre chanson A Lemri (O Miroir) a laissé derrière lui une œuvre intemporelle. L’amour de Cherif Kheddam pour l’Algérie s’est exprimé de toutes les manières, mais surtout par ce qu’il a donné à la musique algérienne. Sa rectitude d’esprit, sa probité de l’art, la conscience du devoir, le souci de la tâche et du style jusque dans le détail, voilà le vrai Cherif Kheddam. Ce souci se retrouvera poussé au même degré chez Schumann, pour ceux qui connaissent la musique universelle. On découvre en lui, à côté de l’homme sensible, un musicien hors pair et un poète fantastique. Un réaliste clairvoyant et un organisateur formidable que n’ont jamais soupçonné ses admirateurs algériens et étrangers. Ils ont applaudi le musicien virtuose, sans connaître vraiment ses concerts. On a toujours salué en lui le chef d’orchestre sans connaître ses formes actives dans le monde musical universel. Ses œuvres sont inséparables de son amour des gens du pays. Ainsi Etsghennigh thamourthiw (je chante mon pays) et Ldzayer atsahloudd (Algérie, tu t’en sortiras), sont deux titres composés dans des périodes différentes, mais qui forment un hymne en hommage à l’Algérie. Ses chansons mélodieuses ont toujours subjugué son public, notamment avec une orchestration qui vous emporte. Ses textes sont intemporels et nous rappelleront toujours ce maître inégalé doté de valeurs nationalistes. Né à Boumessaoud, dans la commune d’Imsouhal, daïra d’Iferhounen, wilaya de Tizi Ouzou, il ne suffisait pas à Cherif Kheddam d’être un des meilleurs chefs d’orchestre de son temps, un chef de grand style, sa maîtrise fut vite assurée et aujourd’hui encore, son style est inégalable. Même si aujourd’hui son village est embelli, il garde toujours l’architecture des anciennes maisons et celle de notre artiste est devenue un patrimoine historique en hommage à tout ce qu’il a donné pour la culture de son pays. Compositeur et auteur de chansons dont plusieurs sont devenues, au fil du temps, des succès majeurs, Chérif Kheddam a aussi composé pour d’autres grands artistes. Ainsi a-t-il marqué toute une génération par son talent et ses créations artistiques audacieuses. Son répertoire contient un travail fastidieux de plus de 60 ans. Ses compositions demeurent plus immortelles les unes que les autres. Son style, ou plutôt son genre a hissé la musique algérienne et kabyle en particulier au firmament de l’art. Créateur, il a beaucoup contribué à l’évolution de la musique kabyle dans le monde. Ses chansons ont fait vibrer à l’unisson tous les cœurs de la patrie.
écrivain