Maudit et mortel virage!
Deux mille neuf cent dix morts et plus de trente mille blessés en six mois, avouez, même si cela ne représente que des statistiques «approximatives,» pour la petite histoire, que c'est un peu trop.
Qui dit accident de la route, insinue, et c'est triste, mais c'est comme ça: deuil, sang, vies à jamais perdues, incessants pleurs, tristesse, amers regrets, chaudes larmes, blessures profondes, et lourds autres, handicaps. Le juge appelle à la barre, deux familles concernées par un accident, survenu au niveau d'un virage qui n'avait rien d'anormal et pourtant qui a fait un mort, et trois blessés. Le tout s'étant déroulé en plein centre-ville, à seize heures. L'inattention, le laisser aller, le portable au volant peuvent effacer en une seconde, une vie, un sourire, un mot d'affection! Mercredi dernier, un jeune de vingt ans tout ronds, qui a pris la voiture familiale, raconte l'horreur: «J'ai pris le volant, cet après-midi là, pour, dira-t-il au président, goûter aux 1ers moments de loisirs que procurent généralement, ces tours en ville! Je roulais à quarante km/ heure.»
-Oui, admettons, le procès-verbal est là. Par contre, ce que le tribunal veut savoir, cc'est l'endroit où vous vous trouviez au moment du choc avec la voiture conduite par le défunt Chaàbour.N. Qui a voulu vous toucher, et même de peu, avant qu'il ne vous entre dedans, d'après les témoins!» La réponse de l'inculpé, est raide, franche, et lâchée, sans détours. Il regrette que le volant lui ait échappé au mauvais moment, présente ses sincères condoléances à la famille du défunt «qui était comme moi très jeune, et souriant à la vie, mais que voulez - vous, le mektoub a voulu qu'il rate le virage, au même moment, quand j'entamais mal le mien!» C'est tellement rare d'assister à ce genre d'explications au juge, que la majorité des gens sont restés bouche-bée tandis que l'inculpé s'expliquait lentement, sans paniquer et surtout sans mentir. Il a décidé de se déplacer à la salle d'audiences, prêt à répondre à toutes les questions, sans vouloir prendre des raccourcis nuisibles à la recherche de la vérité. Le président est satisfait du mea-culpa de l'inculpé, qui n'avait d'autre choix que de raconter la vérité toute nue, car le bonhomme a montré sa bonne foi, dès l'entame des débats, et montré surtout qu'il assumait à moitié, sa responsabilité. Ce que savait aussi, que le défunt, a été victime de l'état de la voiture, le rapport de police faisant foi! Cette sortie de l'inculpé est en quelque sorte un préambule à sa défense, car il savait très bien, qu' il n'y était pour rien dans cet accident. Il faut vite le souligner, l'excès de vitesse du défunt a causé le sinistre. Le chauffeur ne connaissait pas probablement ce tronçon de la route, contrairement à lui qui était du quartier. C'est un point important durant la mise en examen de l'affaire qui a vu un célibataire quitter ce monde, où les morts et disparus ne sont plus, hélas, regardés avec un oeil neutre. Le jeune conducteur s'est éteint sur le coup, suite au choc de la voiture contre le pylône, qui a été complètement tordu, tellement la violence de l'impact était forte! Le sinistre a eu lieu, et on n'y peut absolument rien. Reste maintenant à la justice de se prononcer, car pour la famille du défunt, il y a meurtre! C'est comme cela! Les gens n'y peuvent rien: un mort est forcément assassiné! Pour ce qui est de ce nouveau drame, il faut surtout retenir la responsabilité partagée. Les deux conducteurs ont commis exactement la même bévue! Ils ont omis de prendre le maudit virage par une étonnante maladresse, difficilement compréhensible. Le magistrat est carrément aux anges, d'entendre l'inculpé mordre le sinistre. Il s'adresse de suite au procureur, ni plus, ni moins, que l'application de la loi, estimant que la responsabilité était partagée et donc, il a préféré laisser le président se débrouiller avec la sentence, qui ne pourra aller, qu'avec la rigoureuse, application de la loi. Sur ce, elle décide d'une mise en examen de quinze jours, le temps, pour l'honorable magistrate, de bien réfléchir sur l'affaire qui a valu par la transparence des déclarations, et une claire enquête, menée rondement par la police judiciaire du coin.