«Le poignard m'appartient»

La rixe qui a mis aux prises deux voisins de longue date, a permis aux flics d'intervenir à temps, et empêcher par là, un affreux crime, que tout le monde aurait mis sur le dos du «pauvre mektoub». Après avoir rapidement parcouru tout le contenu de l'ordonnance de renvoi, le juge mit sa grosse main sur son menton, et souffla: «De nos jours, pour un moins que rien, on brandit un poignard sans se soucier des dramatiques conséquences, qui mènent droit l'auteur du fâcheux geste, sur une incalculable catastrophe» martèle le président de la section correctionnelle du tribunal, devant un parterre de curieux venus voir de près à quoi ressemblait la justice d'après le 22 février 2019. De prime abord, il n'y avait pas grand-chose de changé, si ce n'est le nombre incalculable de dossiers à traiter.
L'affaire du jour a trait à un dossier de coups et blessures volontaires ayant causé une incapacité de douze jours.
Le fameux article 264 du Code pénal, dispose, en effet, dans ses premiers alinéas, que:
«Quiconque, volontairement, fait des blessures ou porte des coups à autrui ou commet toute autre violence ou voie de fait, et s'il résulte de ces sortes de violence, une maladie ou une incapacité totale de travail pendant plus de quinze jours, est puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans et d'une amende de (100000) cent mille à (500000) cinq cent mille dinars...»
«Inculpé Réda, vous allez commencer immédiatement, par prendre une résolution intérieure, afin de tout dire au tribunal, sans chercher de tricheries, ni à gagner inutilement du temps! Vous avez intérêt à ne dire ce qui s'est réellement, passé, et nous aurons ainsi, une nette idée sur ce qu'il nous faille entreprendre, en toute transparence, sans fard, ni fausses excuses. Seule, la vérité nous permettra d'aller droit sur la clarté! Est-ce que je me suis fait bien comprendre? Je ne voudrais pas répéter, ce que je suis en train de dire!» annonce, sans se précipiter, le président, qui est, ce matin-là, effectivement bien dans sa peau, la bonne humeur en plus!
Les deux compères étaient détenus, car un poignard a été trouvé sur les lieux de la rixe, et il faudra bien dénicher l'ex- porteur de l'arme blanche! Nous avons tout le temps nécessaire, et tous les moyens de le savoir, et aujourd'hui. Nous devons savoir qui l'a brandi.À propos, le couteau trouvé sur les lieux, nous a permis de découvrir qu'il appartenait à Oualid. H. Mais le poignard appartient à qui?» dit, d'un seul trait, le magistrat venu cette matinée du dimanche, il est vrai, en superforme, malgré une lourde journée du samedi chargée, d'une permanence pleine, harassante et prolifique, car la ville abritait son grand derby de foot, amenant avec lui tous les désagréables... désagréments que seule, une partie de football, entre d'impétueux voisins, amène.
Le juge n'attendra pas longtemps, le nom du coupable ayant brandi le poignard, au milieu des six bagarreurs. «Vous les quatre inculpés, le tribunal s'intéressera à vous sitôt, le noeud des deux principaux antagonistes, dénoué!»lance soudain le juge plutôt braqué sur Oualid.H. et Réda. M. Ce dernier provoquera la stupeur en criant du fond de ses tripes: «M. le juge, si Toufik.D.la victime reconnaissait que le poignard m'appartenait, je prendrais le risque de passer cinq ans d'emprisonnement ferme.» Le juge se tourne vers la victime qui baissa les yeux en murmurant: «Effectivement, j'ai sorti le poignard mais jamais, je ne l'ai brandi!» reconnut enfin la victime. Le juge se détendit nettement et déclara, sans embage: «Enfin! Nous tenons le propriétaire de l'arme blanche, trouvée sur le sol. La suite est plus facile. M. le procureur, vos réquisitions, svp!» Le parquetier se leva et dit d'un trait: «L'élément nouveau nous pousse à requérir le maximum de la peine contre les antagonistes, car le certificat médical n'a pas été ramassé du...sol, comme le couteau.» sur ce, le juge demanda le dernier mot aux inculpés, et donna rendez-vous à la semaine prochaine, pour prendre acte du verdict.