L'accusé crache le morceau

La minuscule salle d'audience du tribunal de Bir Mourad Raïs (cour d'Alger) n'a jamais été aussi... vaste que ce lundi. En effet, le manque de curieux, par la menace de Covid-19 oblige, a fait que les magistrats ont mené à bien leur boulot.
Le service d'ordre a pris les dispositions qu'il faut en vue de permettre aux magistrats et aux inculpés, d'évoluer à l'aise.
Et pour ce faire, la disposition première que les flics ont prise très simplement, fut de ne laisser entrer que les très proches parents des jeunes concernés par ce mini- drame de la -hélas-vie quotidienne. Il verra les policiers serrer de près les détenus qui ne semblaient pas abattus par la détention préventive.
Une détention survenue à la suite d'un vol d'un bijou commis à l'arraché, à l'encontre d'une jeune fille du bas-côté du quartier résidentiel mais néanmoins populeux de «Mohand Saïd Hamdine» (Bir Mourad Raïs-Alger).
Les présumés voleurs ont été pris en chasse aussitôt et immédiatement après les premiers cris lâchés par la victime. Le délit de vol est un fait prévu et puni par l'article 350 du Code pénal. Foudil S. est le premier inculpé à être interrogé. Mûr, conscient des faits reprochés et «courageux», il crache le morceau devant le juge, vraiment emballé, par tant de franchise, malgré l'enjeu!
«Nous avons été tentés par Satan et...».
Le magistrat l'interrompt 20 secondes pour demander au brigadier d'effectuer un tour dans «Saïd Hamdine» et ramener Satan! Puis, il demande au second inculpé, Badr- Eddine Z. 19 ans, d'être aussi bref et aussi crédible dans ses réponses au tribunal qui n'a pas de temps à perdre.: «Est-ce que vous reconnaissez les faits comme votre copain vient de le faire aussi clairement que rapidement, sans détours, ni inutile résistance? Que répondez-vous? Et que la réponse soit la plus brève et significative possible!», tonne sans trop s'emballer, le président, qui a tout de même gardé sa légendaire bonhommie.
En effet, les réponses ont pratiquement été les mêmes que celles du premier détenu. Le magistrat posera encore la question qui semblait le tarabuster:
« Comment vous est venue l'idée de vous attaquer à cette innocente étudiante, et comment vous vous y êtes pris?», chantonna presque le président qui était ce jour-là, dans son assiette. Foudil S, le plus âgé des deux détenus lève le bras droit pour répondre. Le juge veut d'abord écouter le plus jeune pour une raison que lui seul domine! « Nous étions fauchés, et voulions prendre quelque chose juste à côté, près de Sidi Yahia.
C'est à ce moment-là, que cette demoiselle surgit du virage du parking, enleva son collier el le mit dans son sac. Nous avons vu en même temps le procédé utilisé par la fille. Houième B. la victime, faisant des yeux de merlan frit, voulait placer un mot, mais en vain, l'émotion ayant eu le dessus! Elle se taira jusqu'au moment où le juge la priera d'effectuer les traditionnelles demandes de dommages et intérêts.
Elle dit innocemment:
«J'ai récupéré mon bien. Je ne veux rien d'autre.» Toutes les questions du tribunal ont été posées à toutes les parties. Elles ont satisfait le tribunal.
Après avoir noté les 3 ans d'emprisonnement ferme réclamés par le procureur, le juge attendit que les détenus prononcent le traditionnel dernier mot des deux inculpés, pour annoncer la mise en examen du dossier pour la fin de l'audience, dans un silence religieux.
35 minutes plus tard, le juge revient solennellement dans la salle d'audience pour procéder à la lecture des sentences tant attendues par les parents qui attendaient dehors, inquiets au plus haut point par le devenir de leurs turbulents enfants. Il lut à voix basse le verdict qui a surpris les initiés: «Les inculpés de vol à l'arraché, écopent d'une peine d'emprisonnement de 18 mois dont 6 fermes.»
De quoi calmer les ardeurs...