Ben Laden on line
Le virus est un microbe qui infecte les êtres vivants. Il peut aussi, depuis quelques années, s´attaquer aux systèmes informatiques. Mais ce qu´on savait moins, c´est que le virus peut n´être qu´un cheval de Troie, un moyen efficace d´entrer dans votre ordinateur pour le contrôler. C´est en effet ce qui vient d´arriver avec ces courriels qui prétendent offrir des images du suicide d´Oussama Ben Laden et qui contiennent en fait un cheval de Troie, virus permettant à des hackers, pirates informatiques, de prendre le contrôle à distance de l´ordinateur infecté, a averti la société anti-virus Sophos. «Cette fois, déclare Graham Cluley, consultant senior pour Sophos, les pirates et les fabricants de virus semblent s´adresser à la curiosité morbide des gens et à leur appétit d´informations sur la guerre contre le terrorisme.»
Ainsi, via Internet, tous les ingrédients des spécialistes des films d´horreur et des recettes des médias sont réunis : mettre du sang à l´affiche ou à la une pour attirer les gogos, voyeurs et autres spectateurs avides de sensations fortes. Internet n´est qu´un média comme les autres. Il peut aussi bien nous inviter à la réflexion et au savoir que nous plonger dans les scènes de voyeurisme dont raffolent les cinéphiles ou les internautes, avec cette particularité qu´Internet peut échapper au contrôle direct des gouvernements et des patrons de presse.
N´importe quel individu ou groupe peut créer un site et balancer ce qu´il désire sur la toile.
Tout comme on peut vendre, acheter, payer, transmettre des informations, des données et des images via le web, dans un cadre tout à fait légal, il offre également aux réseaux de mafia ou de terrorisme la possibilité d´échanger des renseignements, de blanchir de l´argent ou d´organiser des attentats à l´autre bout de la planète, arrivant à déjouer par mille et une ruses la vigilance des banquiers ou des services de sécurité.
Au moment où, par exemple, se multiplient les enlèvements et les exécutions en Irak, Internet apparaît comme un formidable moyen de propagande pour les groupuscules affiliés aux différentes tendances qui luttent contre les forces de la coalition. Il a suffi que le gouvernement philippin cède au chantage pour voir se multiplier les kidnappings.
Le fait même que ce nouveau virus informatique utilise à la fois le nom de Ben Laden et l´idée de son suicide est un indicateur de l´efficacité de ce double leurre: la mort virtuelle de l´homme qui a organisé les attentats du 11 septembre et qui a fait trembler l´Etat le plus puissant du monde est associée, dans l´esprit des inventeurs du virus «le Hackarmy», à la spectacularisation des pulsions morbides qui sommeillent en chacun des internautes. La référence au cheval de Troie, une guerre qui remonte à plus de trois mille ans et qui est racontée dans l´Illiade d´Homère, veut tout simplement dire que ces pulsions ne sont pas nouvelles, mais qu´elles sont portées par l´homme depuis la nuit des temps.
Tout comme les anciens pirates écumaient les mers en quête de navires à détrousser, les nouveaux surfent sur le web en cherchant des ordinateurs à contrôler, des réseaux à pénétrer, des banques de données à piller. A ce qu´il paraît, la Nasa elle-même et le Pentagone, réputés être les endroits les plus sécurisés de la planète, ont été la cible de ces pirates d´un nouveau genre. Le plus curieux, c´est qu´il suffit de peu de chose pour qu´un petit génie de l´informatique se lance dans une tentative de piraterie, et que nul n´est à l´abri, en quelque endroit de la planète que ce soit.