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France: l'été de tous les dangers?

«Si le temps est insuffisant pour apprendre, il est parfaitement suffisant pour oublier», affirmait Aristote. Pour le cas qui nous intéresse, qui se nomme pour la circonstance Macron, ce temps va-t-il, au moins, lui être suffisant pour oublier?

D'emblée, la réponse nous apparaîtrait négative. Car les matières à oubli ne semblent pas inépuisables, à première vue. Car le courroux est grand en France, depuis cette intervention surprise du chef de l'État français, lors de cette veillée électorale, du 9 juin dernier, où les enjeux étaient essentiellement européens et ne préludaient nullement d'aussi renversantes répercussions internes. D'autant que, depuis la création de cet espace européen commun, en novembre 1993, aucun des pouvoirs qui se sont succédé en France n'ont été tentés de modifier le cours des évènements internes, au lendemain de n'importe quelle consultation européenne. Comment est donc venue à l'esprit de Macron cette (folle?) idée de dissolution du Parlement? Beaucoup d'analyses ont vu le jour au débit d'une outre d'eau tiède percée, mais aucune n'a pu révéler l'équation secrète qui aura mis à terre une architecture que la «macronie» avait patiemment érigée en un système de gouvernance à majorité hétéroclite, cependant.
Or, depuis deux semaines, loin des travées d'un Parlement en cessation temporaire d'activités pour cause de faillite électorale, la France égrène les nuits blanches en attendant la fin du «calvaire électoral», prévu en deux temps (30 juin-7 juillet).
Mais d'ores et déjà, un premier résultat a été enregistré, la défaite personnelle du président Macron. Il est parti seul, il se retrouve isolé à l'arrivée.
Fait encore plus probant, selon des proches de son premier cercle, depuis l'entame du second mandat en 2022, il était devenu notoire que les décisions «décisives» étaient prises dans le secret du bureau présidentiel avec un groupe de personnes triées sur le volet, les mêmes qui avaient «pensé» cette fameuse dissolution, soit deux préposés à la fonction du «fou du roi»: Bruno Roger-Petit (alias «BRP»), conseiller mémoire de l'Élysée et... Pierre Charon, homme à tout faire de Jacques Chirac à la Mairie de Paris (qu'il a fini par renvoyer «pour un ragot de trop sur sa fille Claude») puis «porte-flingue» de Nicolas Sarkozy à l'Élysée. De ce dernier, c'est Macron qui esquissera le portrait le plus proche du réel: (...) «Voici ce que vous êtes: un homme pétri de résistance, de complots qu'on pense impossibles, de projets fous.» Et c'est à ce même factotum habitué aux ors de la République qu'il passera un savon des plus mémorables, la semaine passée, pour avoir informé un «ami à Cnews» de l'imminente décision que le locataire allait prendre, alors que Gabriel Attal, le Premier ministre, la présidente du Parlement et le patron du Sénat n'ont été mis au parfum que 20 minutes avant l'annonce télévisée de cette décision qui mit le feu aux poudres.
Les rédactions aussi bien que les hommes politiques, certains du propre camp d'Emmanuel Macron, lâchèrent la bride pour foncer droit sur la statue du commandeur, plus fragilisée que jamais. Inconscient ou bravache, Macron, alias Jupiter, continue de s'autoconvaincre de son bon droit. À un grand patron, proche de la macronie, qui lui demandait dernièrement si c'est «pas trop dures, ces journées?» et le locataire de lui répondre: «Mais pas du tout! Je prépare ça depuis des semaines, et je suis ravi. Je leur ai balancé ma grenade dégoupillée dans les jambes. Maintenant, on va voir comment ils s'en sortent.» Sauf que les autres, globalement, s'en sortent; la gauche a réussi (aux forceps) l'union de ses principales composantes accouchant du Nouveau Front Populaire; à droite, c'est le RN, avatar du parti lepéniste, Front National, qui semble rafler une bonne partie de la mise de ce camp, avec le mariage incestueux entre une fraction des Républicains de Ciotti et le Rassemblement National de Marine Le Pen, dont elle a confié les clés au mari de sa nièce, Jordan Bardella. Et qui espère les clés de Matignon dans les semaines à venir, ce qui met hors d'elle l'autre France qui a toujours combattu l'extrême-droite depuis Vichy, en passant par la guerre d'Algérie et ses lendemains sanglants pour la communauté algérienne émigrée essentiellement qui paya des années durant le prix de la défaite des sicaires de l'OAS et des commandos Delta et autres «Honneur de la police» qui sévirent jusqu'à la fin des années soixante-dix.
Et à la fondatrice du fameux Théâtre du Soleil, l'historique metteure en scène Ariane Mnouchkine de fustiger: «Ce geste du président de la République - ce geste d'adolescent gâté, plein de fureur, de frustration et d'hubris (...)»
L'ancien Premier ministre de Macron Edouard Philippe, qui a créé son propre parti, n'y est pas allé de main morte, lui non plus, en l'accusant d'avoir «tué la majorité présidentielle». Il est vrai que le parti présidentiel «Renaissance» qui court sous la casaque «Ensemble» se situerait, aux derniers sondages, loin derrière la gauche et l'extrême-droite. Du côté de la société civile, et à côté des gens de culture, ce sont les chercheurs qui sont montés, samedi dernier, au créneau pour avertir le RN que sa politique d'exclusion (en matière de santé, notamment) ne passera pas par eux. «Les fruits de nos recherches doivent servir à tous. Il n'est pas question d'exclure quiconque d'une prise en charge quelconque (...) Une société éclairée est une société libre. Ne laissons aucun obscurantisme nous envahir», écrivirent les 649 chercheurs signataires de cet appel. Les diplomates ne sont pas restés muets. Dans un appel signé par 170 d'entre eux, ils ont réaffirmé avec force leur confiance en la grandeur de leur pays qui, «comme à chaque fois que ses valeurs et sa force ont été en danger, fera le choix de la paix, de l'indépendance, de la liberté (...) animée de fraternité, de liberté et d'égalité».
Pour ce qui est des éventuels cas de figure, par rapport à l'Algérie et à la communauté algérienne, envisagés par le RN et ses alliés, si d'aventure il accédait au pouvoir, des pistes de réflexion seront proposées dans une prochaine publication qui sera exclusivement consacrée à cette perspective. Mais, disons-le dès maintenant, il n'y a pas lieu de s'inquiéter outre mesure, et à Paris plus d'un observateur nous l'a confirmé: la quinte royale est entre les mains d'Alger. Mais la vigilance reste de mise, bien sûr.

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