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2024-2029: au seuil d'une nouvelle aventure industrielle

En 2007, un livre blanc gouvernemental sur «la stratégie et les politiques de relance et de développement industriels» imputait «le processus de désindustrialisation amorcé à partir de 1980» à un «retournement du marché des hydrocarbures», suivi «d'une crise durable de la dette extérieure (1988-98)» qui obligent les pouvoirs publics à «prendre des mesures drastiques de stabilisation». Ces mesures ont généré une logique nouvelle qui fait de l'économie de marché une option impliquant forcément des réformes structurelles. Amorcées en 1989, celles-ci seront toutefois contrariées par la crise de la décennie 1990 et ses retombées sociales et matérielles. En effet, son impact désastreux a conduit le pouvoir à profiter de la remontée des prix du pétrole (années 2000...) pour privilégier l'apaisement des tensions sociales et réaliser des infrastructures. En gros, les soucis de court terme prirent le pas sur la réforme dans la durée. Dans ce contexte, l'investissement a reflué au profit de la consommation des ménages via des importations massives de produits parfois superflus. Les citoyens étaient relativement comblés, mais le travail tangible de restructuration sur le temps long pour asseoir une économie solide de production piétinait. Il est vrai qu'une besogne préparatoire de diagnostic et de projection sur l'avenir a été accomplie et mise sur papier dans de multiples textes, rapports et discours servant de boussole dans des domaines essentiels (cf. H. Djiar, 2018). Mais la mise en pratique ne s'est pas déroulée au rythme désiré en raison des mentalités et des hésitations, ainsi que des lourdeurs bureaucratiques et de l'étiolement du sens profond de l'intérêt collectif. Aujourd'hui en tout cas, la condition d'une croissance pérenne par le biais du développement des activités productives dont l'industrialisation constitue un socle robuste est manifestement une préoccupation centrale des hautes instances de l'État. Celles-ci se rendent compte qu'outre l'agriculture le pays doit faire de l'industrialisation un problème prioritaire au cours de l'étape 2024-2029. Conscientes du retard pris par l'Algérie sur les nations émergentes, elles ont affiché leur engagement à la guérir de son anémie économique qui la rend vulnérable et amoindrit son influence dans le monde. En ce sens, les exemples de pays comme la Chine et le Japon sont fort instructifs. En effet, en Chine «l'industrialisation fut l'un des éléments fondamentaux de la stratégie de développement puisque 50% environ des ressources d'investissement étaient consacrés à l'industrie dans les années 1958-59», soit une décennie à peine après la création de la République populaire. Antérieurement (1948-58), «ce pourcentage n'avait cessé de croître de façon continue» (J. P. Saltiel et coauteurs, 1968). De son côté, le Japon fit son entrée dans le monde industriel au XIXe siècle, en commençant modestement par de petites industries peu coûteuses. Concernant l'Algérie, un processus d'industrialisation a été amorcé avec le fameux plan de Constantine (1958) par lequel le colonisateur s'imaginait pouvoir mettre fin à la Révolution.
L'indépendance mit un terme à ce plan, sauf pour certains projets relevant de l'aide dite «liée». Après 1965, un bond sera fait selon trois axes: 1- nationalisation des mines et autres ressources; 2- implantation d'une industrie lourde; 3- promotion des industries légères. Cette démarche initiée par l'État a permis à notre pays de devenir une référence dans le Tiers-Monde et de faire une entrée remarquée dans la vie industrielle. L'idée qui le guidait était qu'un pays sous-développé «doit parvenir à une modification de la structure de ses exportations, faire en sorte que les recettes de ces exportations soient non seulement diversifiées, mais surtout accrues grâce à leur valeur ajoutée par la transformation de certaines de ses productions. En d'autres termes, au lieu de n'exporter que de la matière brute à vil prix, il exportera aussi le travail de son peuple. C'est par là que réside l'amorce de l'industrialisation dont la première étape apporte nombre d'autres avantages: le relèvement du revenu national et du niveau de la main-d'oeuvre et des cadres, l'augmentation de l'emploi, l'amorce de la création d'un marché intérieur, c'est-à-dire une moindre dépendance des marchés extérieurs» (H. Boumediène, 1965). En 2024, cette idée n'a pas pris une ride, même si les conditions de mise en oeuvre pratique ont profondément changé à partir de 1980, comme indiqué précédemment. Dans ces nouvelles conditions, notre pays s'apprête à retrouver le chemin de l'aventure industrielle qu'il a perdu depuis plus de quatre décennies. Trois méthodes sont envisageables: 1- soit voir grand en s'engageant dans une industrialisation d'envergure via de gros investissements qu'il faudra alors attirer par toutes sortes d'incitations fiscales et autres, ainsi que par des réformes minutieuses; 2- soit s'engager plus modestement, pour commencer, sur une voie conduisant à la micro, la petite et la moyenne industries qui nécessitent peu d'investissements; 3- soit combiner ces deux méthodes, selon une démarche pragmatique. Quoi qu'il en soit, sa volonté affichée de relancer l'économie incline assurément le candidat Abdelmadjid Tebboune à s'investir dans la résolution de cette problématique. 

Membre du Conseil de la nation

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