Par une journée d'hiver... printanier
La présidente de la section correctionnelle du tribunal était dans un état second, probablement victime de la grippe qui noie tout l'Algérois depuis plus d'une quinzaine de jours. Son regard vitreux en est la meilleure preuve. À sa droite, est assis le très jeune procureur, fraîchement débarqué de l'École nationale de la magistrature. Plus à l'extrême gauche, Selma, la déjà vieille greffière semble la plus en forme du moment. Elle s'affaire devant son écran, en attendant que l'audience, dominée par un rôle pas possible, atteigne la vitesse de croisière. Tout allait vite, et malgré ce bénin constat, une lourdeur planait dans la salle d'audience, surtout lorsque la magistrate, appelait devant elle, des avocats qui entamaient une discussion qui semblait interminable. Il y a comme ça, des arrêts d'audience que seuls les initiés saisissaient, au vol. Les magistrats prenaient tout leur temps pour trancher, un cas, ils n'ont d'ailleurs pas une éternité pour finir leurs audiences hebdomadaires. À leur décharge, il faut souligner que les rôles dépassent l'entendement, et ce, depuis 2010. Trop de délits, trop de présentations, donc trop d'audiences!
La juge avait déjà atteint le tiers du rôle, lors de l'appel des causes, qui s'est illustré par un nombre appréciable de renvois justifiés, surtout que la fin de l'année 2022, pointait son nez printanier. Un monde fou occupait les bancs de la vaste salle d'audience.
La victime, elle, se confinait dans une attitude normale, pour une épouse battue, et de quelle manière! Elle était debout à la barre, à droite de l'inculpé, son «sauvage» de mari,
-(ll'expression était du beau-père de l'inculpé) - derrière son avocat, qui suivait assidûment les gestes automatiques de la juge, décidée plus que jamais à rendre justice, à la femme humiliée, frappée, blessée, et par-dessus tout, honteuse de voir son mari détenu, entré à ll 'audience, escorté par un agent de la Dgsn, comme s'il était accusé de trafic de came!
