Trois ministères en première ligne
Le grand pari de l'Exécutif est de permettre aux Algériens de penser à autre chose qu'à leur estomac. Le réussira-t-il?

La marathon ramadhanesque débute aujourd'hui pour trois ministres du gouvernement. Les départements du commerce, de l'agriculture et de lintérieur n'auront aucun repos tout au long de ce mois qui s'annonce compliqué. En effet, face à une horde de spéculateurs qui se cachent derrière un circuit de distribution assez peu efficace, faut-il en convenir, les contrôleurs des Directions de la concurrence et des prix, ne seront certainement pas assez nombreux pour mailler un très vaste territoire où l'on compte 58 wilayas, 1541 communes, des dizaines de milliers de quartiers et autant de villages. Le déficit logistique, en sus de la numérisation qui ne suit pas, rend la tâche autrement plus difficile. Heureusement que les services de sécurité apportent leur concours dans la traque des commerçants indélicats. Lesquels semblent ne pas reculer face au risque judiciaire qu'ils encourent. Des condamnations allant jusqu'à la perpétuité ont été prononcées contre ces spéculateurs. Mais même si la répression a fait réfléchir plus d'un, il n'en reste pas moins beaucoup de criminels potentiels dans la nature, qui continuent à pratiquer un commerce illégal, suscitant un risque de déstabilisation sociale. La lutte ne baisse pas d'intensité et les résultats sont là sur les produits de large consommation, dont les tensions qu'ils subissent demeurent sous contrôle des pouvoirs publics qui parviennent tant bien que mal à alimenter le marché. Mais la guerre n'est pas près de finir et peut même durer tout le mois de Ramadhan. Une guerre que mène aussi le ministère de l'Agriculture, à travers ses nombreux établissements. Que ce soit dans les produits maraîchers, l'aliment de bétail, le poulet ou encore les viandes rouges, les démembrements de l'Agriculture s'activent, avec des fortunes diverses, à alimenter le marché à des prix «étudiés». Ils ne sont pas parvenus à imposer leur loi dans un système d'offre et de demande très largement déstabilisé. Les importations de viandes rouges, dont les premières cargaisons ont été réceptionnées ces derniers jours, n'ont pas encore impacté le marché. Les Algériens ne savent pas tellement où est situé le millier de points de vente de cette viande. Et les promesses de l'administration de l'agricultures n'ont pas encore d'effet sur le terrain. Cela dit, au vu des moyens déployés, il est possible de rattraper le retard. Mais encore faut-il agir massivement sur le marché. Pour cela, les établissements dépendants du ministère ont une petite semaine pour faire valoir leur «puissance» et remplir leur part du contrat conclu avec les consommateurs. Et au-delà de la semaine, le défi sera de maintenir la dynamique, de combattre les spéculateurs sur le terrain de la disponibilité des produits. Ce ne sera pas de tout repos. La guerre sera longue et difficile. Les Algériens, qui saluent l'apparition ici et là des «marchés de la Rahma», ont certainement autre chose à apprécier en ce mois sacré. Ils voudraient ne pas perdre leur temps dans des fils d'attente interminables, ni courir les bouchers à la recherche de la fameuse viande à 1200 Da le kilo ou le litre de lait à 25 DA. Le grand pari de l'Exécutif est justement de permettre aux Algériens de penser à autre chose qu'à leur estomac. Le réussira-t-il? L'avenir très proche nous le dira.